vendredi 27 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
Médecin de famille
Jean-Paul Renault

 

 


Peut-il, votre serviteur, être totalement impartial avec ce témoignage ? Certainement pas. Mais, au moins, je peux certifier que tout ce que narre Jean-Paul Renault, médecin de famille et médecin de campagne, est authentique. Ses souvenirs rappellent les miens – celle d’une autre époque – sauf que lui l’a vécu activement alors que l’écureuil n’a été qu’un spectateur passif.

Déjà auteur de « Nous, médecins de campagne », Jean-Paul Renault raconte cette fois moins son métier mais porte un regard très attendrissant sur les personnes qu’il a côtoyées depuis son enfance et qui resteront dans son cœur à tout jamais.

Issu d’une famille de médecins, combien de fois ses patients lui ont raconté des anecdotes sur son père ! Des instants qui marquent. Ses débuts dans les années soixante-dix riment avec un style de vie encore loin de toute technologie – ah cette antenne immense sur le toit de la maison pour le téléphone-radio – et où personne n’hésitait à prendre quelques verres dans la journée dans tous ses petits bistrots où flottaient un bon air  de convivialité.

Artisans, paysans, ouvriers, le Dr Renault sympathisait avec tout le monde tout en séparant son travail des activités disons ludiques. C’était un temps où les visites étaient nombreuses mais où le médecin pouvait déceler encore mieux toutes les particularités de ses patients ; comme il le souligne lui-même, dans un cabinet, une réserve, une distance s’installe, contrairement à « chez-soi ».

Un récit indispensable pour connaître ou se remémorer ce que fut la médecine d’antan. Merci Docteur !

Jean-Paul Renault – Médecin de famille – Éditions La Bouinotte – Octobre 2021

 

 

mardi 24 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
Le bureau d’éclaircissement des destins
Gaëlle Nohant

 


International Tracing Service. ITS. Trois mots, trois lettres pour le plus grand centre de documentation de la Shoah. Une mémoire vive pour les victimes, un centre d’histoire, un lien pour les familles, un devoir pour l’humanité. En 2013, l’ITS a intégré le Patrimoine documentaire mondial de l’UNESCO. Désormais appelées les Archives Arolsen depuis 2019, c’est dans cette même ville que nous faisons la connaissance d’Irène, cette française qui travaille avec dévotion à la recherche de documents pour montrer au monde le pandémonium nazi. Vingt-cinq ans après son arrivée, une nouvelle mission lui est confiée : restituer les milliers d’objets que le centre a hérité après la libération des camps de l’horreur. Vaste gageure…

Gageure de retrouver des survivants, gageure de retrouver les descendants des victimes, gageure de ne savoir quelle sera la réaction des personnes contactées. Gageure de ne pas flancher face aux émotions. Fiction humaine dans l'inhumaine réalité.

Progressivement, le lecteur fera connaissance avec Irène, son fils, ses collègues de travail. Puis, viennent les histoires, toutes aussi bouleversantes : du petit Pierrot jusqu’à cette femme non juive qui aurait pu survivre mais qui a préféré accompagner un petit garçon juif dans les fournaises de la Grande faucheuse nazie. Et d’un destin en découle un autre : celui des enfants arrachés à leurs parents pour en faire de vertueux aryens auprès de familles adoptives minutieusement choisies.

Une lecture évidemment pesante mais qui permet d’avoir une vision du travail de fourmis des services des archives de guerre, et, de toutes les atrocités que des hommes commettent. Gaëlle Nohant – qui raconte avec une franchise rare – a fourni un immense labeur en rendant hommage aux victimes et à ceux qui font tout pour que leurs traces ne s’effacent jamais. Grâce à une écriture très fluide, le lecteur peut se retrouver dans ce dédale.

Ah, pour alléger l’ambiance, une note de fantaisie : je n’aurais pas choisi le même galant pour Hélène…

« Le sourire de Stefan s’efface. Malheureusement, l’antisémitisme n’est pas mort avec Auschwitz. Pour s’en rendre compte, il suffit de parcourir les archives du Comité des Juifs de Pologne, qui assistait les rescapés après la guerre. Menacés, parfois assassinés à leur retour, les survivants ont été très mal reçus. Les communistes n’étaient pas un recours. Des policiers et des fonctionnaires d’État ont participé aux pogroms de Kielce et de Cracovie. La majorité des Juifs qui avaient survécu à la Shoah ont quitté le pays ensuite. Ils avaient peur. En 1968, le gouvernement [polonais] les a expulsés au terme d’une cabale médiatique ».

« Chaque pays impose un roman national. Le choix de ses héros et de ses victimes est toujours politique. Parce qu’il entretient le déni et étouffe les voix discordantes, ce récit officiel n’aide pas les peuples à affronter leur histoire ».

Le bureau d’éclaircissement des destins – Gaëlle Nohant - Éditions Grasset – Janvier 2023

vendredi 20 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
L’île haute
Valentine Goby

 


Vadim n’en mène pas large : à douze ans il quitte, au cœur de l’hiver, les Batignolles pour un endroit inconnu : Vallorcine, au pied du Mont-Blanc. Pour des problèmes asthmatiques. Du moins, c’est la raison officielle. Car il prend l’identité d’un autre petit garçon, il va devenir Vincent. Non seulement il va s’exiler de sa ville mais aussi de son identité.

Heureusement, des gens bienveillants vont être à son écoute. Auparavant il faudra d’abord apprivoiser l’environnement qui se projette devant lui : ces immenses monuments de roches enrobés de blanc, sortes de fantômes inamovibles dans lesquels on se creuse un chemin. L’arrivée est difficile mais bientôt la magie du merveilleux va opérer. Malgré l’absence des siens. Précision : nous sommes en 1943…

Roman initiatique par le personnage de Vincent/Vadim qui n’a « jamais rien vu, entendu, goûté, senti, touché » et qui va s’extasier devant la magnificence des Alpes, « rêver l’invisible » sur fond des quatre saisons. Un texte magnifique sur le pouvoir de la nature et du beau pour sauver un petit garçon de la bête immonde. La vie est pourtant rude, la nature dangereuse, à l’image du monde. Mais pour qui sait dompter ses peurs, dépasser ses limites et croire au miraculeux, une voie peut se dégager pour continuer d’escalader la vie. À ces tableau livresques – la richesse des descriptions, le défilé des couleurs, les rivières de mots font de cette fiction une pinacothèque – s’ajoutent un hymne à la montagne, à la nature, à la bienveillance humaine, celle qui tend une main avant qu’un être s’écroule et un authentique hommage aux montagnards.

« Vincent se retourne vers les aiguilles Rouges. Elle ressemble à un poulpe, cette montagne avec ses versants renflés. Il l’ignore, elle n’appartient pas à la chaîne du Mont-Blanc en dépit de sa proximité, ici pas de glaciers somptueux que Victor Hugo qualifiait de murailles d’argent, pas de contrastes aigus, d’aiguilles visibles, de décor spectaculaire source de chefs-d’œuvre littéraires ou picturaux – qu’importe, il ne sait pas que ça existe. Ce que voit Vincent, c’est un morceau de massif cristallo-schisteux plus ancien, plus arrondi, qui constitue ce que les géographes appellent les Alpes externes. Autrement dit, un relief plus modeste, plus facile à apprivoiser. Un jour sûrement, d’autres montagnes altéreront cette expérience originelle, plus pathétiques, plus conformes aux récits des grands alpinistes ; mais aucune ne pourra effacer l’image première, si nette, de ce jour de janvier, elle a la force des initiations. Cette vue-là des aiguilles Rouges se fixe en lui maintenant et pour toujours, sédimente, et chaque nouveau regard l’enfoncera plus loin dans sa rétine. Pour Vincent, désormais, cette montagne est LA montagne, les suivantes n’en seront que des variations ».

L’île haute – Valentine Goby – Éditions Actes Sud – Août 2022

jeudi 19 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
Monsieur Romain Gary (Tome 1 et Tome 2)
Kerwin Spire

 


Incroyable ! On croit tout connaître de Romain Gary et un jour on découvre la formidable biographie romancée de Kerwin Spire. Comme une première fois. À ce jour, deux tomes : l’un pour le Gary consul général de France, l’autre pour le réalisateur/écrivain. Un troisième terminera la vie de cet incontournable figure française qui aimait la France comme si un sang tricolore avait coulé dans ses veines.

Le récit débute à la fin des années cinquante lorsque l’écrivain arrive à Los Angeles pour occuper le poste de consul général de France. L’Amérique, l’Amérique… il l’a eue. Était-ce un rêve ? Pas forcément. Mais ce sont durant ces années que le personnage s’est affirmé, sans toujours pourtant savoir où aller, sans savoir où rester. Sans savoir qui il est, et, côtoyer Hollywood va accentuer cette sensation d’identité multiple. Son couple avec Lesley Blanch bat déjà sérieusement de l’aile, elle reste néanmoins le socle de l’homme volage. Jusqu’à ce qu’il rencontre Jean Seberg. Une nouvelle histoire commence – et le deuxième tome aussi – loin des ors de la République mais sous les projecteurs des plateaux de tournage. Avec plus ou moins de réussite. Quant au diplomate ou plutôt l’idée qu’il se fait de la diplomatie est toujours bien présente, libéré de la fonction officielle il peut exprimer véritablement le fond de sa pensée.

Si le personnage de Romain Gary reste insaisissable, l’homme a été d’une fidélité sans faille à ce qu’il admirait le plus : la littérature et le général de Gaulle – il nommait ce dernier « un chevalier du Moyen Âge » dans toute la noblesse du terme –. Et par ricochet, à André Malraux.

Oscillant entre récit, citations et dialogues plus ou moins réels, Kerwin Spire a su recréer par la fiction le personnage de l’écrivain diplomate en conservant sa pensée, son humour et sa vision du monde. Avec une écriture qui virevolte sans jamais alourdir la moindre description. Personnage doté d’un courage exemplaire, d’une intelligence hors norme et d’un cerveau bouillonnant d’idées, on se demande si toutes ces qualités ne finissaient pas par l’embrouiller lui-même et réveiller des blessures cachées depuis l’enfance. Quant à sa vie affective, elle ne l’aidait guère…les grands séducteurs étant souvent passablement tourmentés.

 S’il fallait résumer ces deux tomes par un extrait, sans aucun doute, ce serait celui-ci. Celui avec Albert Camus :

« Dans le quotidien de leurs existences, Camus et Gary empruntent le même chemin entre espoir et désespoir, exaltation et mélancolie. Ils ont le goût du théâtre, des femmes et de la Méditerranée. Et ils sont aussi hantés par la mort et le suicide. Et c’est de cette ligne de crête que naît le tragique de leur condition. Camus et Gary sont deux hommes simples qui n’appartiennent pas au sérail. Deux hommes seuls, dans le Paris d’après-guerre. Deux frères d’armes, dans les combats politiques, et deux frères de plume dans les luttes littéraires. Deux âmes sombres et deux étoiles noires qui brillent dans la constellation de la N.R.F. Un an après le Goncourt, Albert a le Nobel et Romain pleure de joie ».

 Nous aurions bien besoin d’un Romain Gary de nos jours. Pour nous enivrer de parfums romanesques – Gary faisant partie de ces auteurs qui, même quand ils écrivent sur eux, ne se regardent pas sans cesse dans le miroir pour refléter leur égo – et pour donner une voix raisonnable sur un monde partant en déraison, notamment avec ces déviations extrémistes. Exemple exemplaire lors de l’assassinat du présidant Kennedy :

« L’Amérique n’a pas perdu un père, elle a perdu un fils… écrit-il. Il importe peu de savoir si c’est l’extrémisme, le fanatisme ou la bêtise d’extrême gauche ou d’extrême droite qui ont abattu le président : il nous suffit de savoir que l’extrémisme, le fanatisme et la bêtise sont l’ennemi. C’était l’essence même de la pensée politique de John Kennedy, et ceux qui se réclament déjà de sa mémoire ne devraient pas avoir de préférence lorsqu’il s’agit des assassins ».

C’était dit. Écrit. Bien loin des indignations à géométrie variable.

Monsieur Romain Gary, à lire pour retrouver les racines de l’espérance. Surtout quand les aubes virent au crépuscule.

 

 Monsieur Romain Gary – Consul général de France – Tome 1 - Éditions Folio – Novembre 2022

Monsieur Romain Gary – Écrivain-réalisateur – Tome 2 - Éditions Gallimard – Novembre 2022

par Kerwin Spire

 

vendredi 13 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
Les Chroniques de Bond Street 3
M.C. Beaton

 


Revoilà pour deux nouveaux épisodes nos chers gérants de l’hôtel Au Parent pauvre – devenu prestigieux au fil des histoires  – situé dans le Bond Street londonien à l’époque de la Régence. Le colonel Sandhurst, sémillant septuagénaire, rêve toujours d’épouser la très respectable Lady Fortescue et s’éloigner de la capitale pour la verdoyante campagne. Sir Philip Sommerville, toujours aussi grincheux et cynique a, comme toujours, quelques soucis pour détournement d’argent avec un cheval… Quant à Miss Tonks elle ne désespère pas de rester éternellement célibataire malgré ses quarante passés. Surtout qu’elle a réussi à faire engager Mr Davy, un acteur fauché mais charmant au possible, avec qui elle aimerait convoler en justes noces. Désormais la quatuor devenu quintet n’est plus pauvre mais néanmoins jamais à l’abri de mauvaises – mais fort heureusement d’agréables aussi – surprises.

Ces nouvelles chroniques vont nous faire vivre la vie de Frederika, prise en otage par son propre père Lord Gray qui doit une coquette somme à…l’hôtel du Parent pauvre, puis, celle d’une certaine lady Jane qui loue une chambre pour terminer ses jours sous les toits de l’établissement. Rebondissements, mystères, complots vont suivre mais, forcément, avec des princes charmants pour nous faire vivre de bons moments 😊

Distraction garantie !

Les Chroniques de Bond Street 3 – M.C. Beaton – Traduction : Françoise du Sorbier et Amélie Juste-Thomas – Éditions Albin Michel – Janvier 2023

lundi 9 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
La chanson de l’eau
Erik Orsenna


 

« Et si la musique n’était rien d’autre qu’un sourire, un sourire pour nous consoler, un sourire pour nous enchanter et nous  inviter à danser »

L’une des dernières phrases de ce petit bijou artistique, à l’image d’Erik Orsenna : sourire, consoler, chanter, danser. Des mots pour un objet, des mots pour un peuple.

Le petit Moussa 7 est issu d’une famille de luthiers et l’instrument préféré de son grand-père est une harpe, la harpe ngombi capable de transmettre l’invisible et les voix du sacré : des mots silencieux qui se transforment en sons. Arbres, sable, eau… tous racontent une histoire et Dame Harpe Ngombi se charge d’être la porte-parole de cette Gaïa qui a pied le long des fleuves africains. Nous sommes au Congo mais il en est de même chez le Gabon voisin.

Un tout petit livre pour un immense fleuve d’humanité et de spiritualité sur la corde des vocables avec la grâce des illustrations de Maya Mihindou qui respirent l’Afrique. 

Ce livre, que j’oserais qualifier de spirituel voire d’ésotérique, fait partie de la très élégante collection « Récits d’objets » objets hébergés au sein du Musée des Confluences de Lyon. À chaque ouvrage : une œuvre d’art et un écrivain y posant sa plume. L’académicien l’a déposée sur cette harpe au corps de femme et qui semble naviguer sur la pirogue de vie sous la bannière des cultures fang, tsogho et kele.

La chanson de l’eau – Erik Orsenna – Éditions Cambourakis avec le Musée des Confluences de Lyon – Décembre 2022

samedi 7 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
Gonzalo et les autres
Bénédicte Belpois

 


Gonzalo refuse de servir Franco en faisant son service militaire. Une seule possibilité ; l’exil. Il quitte son Estrémadure natale, son père viticulteur, ses amis sauf ceux avec qui il va faire un grand périple jusqu’en Allemagne puis en France. Après des années passées dans la région de Toulouse et au sein de la Légion, le mal du pays résonne au fond de son âme, d’autant plus que ses amours avec Fanfan ont cessé d’être merveilleuses. Il revient dans son village où son père a toujours cru à son retour et l’attend avec une certaine Marisol… L’histoire de Gonzalo va alors s’effacer pour que les autres racontent la leur : Blanca, Concha, Marco, Constantino, la tia Caya, la Niña…et Ezra alias El Silencio, probablement le plus émouvant de tous ces personnages qui habitent cette galerie agreste.

Bénédicte Belpois signe encore une fois un magnifique roman dans l’authenticité de la gent humaine, chacun se dévoilant peu à peu en révélant les fibres intimes qui se cachent pudiquement sous le costume des apparences. Le retour de Gonzalo va agir comme une libération des esprits, chacun osant révéler sans avoir la crainte d’être jugé. Véritable hymne à la tolérance mais aussi chant à ceux qui doivent subir le poids d’un passé qu’ils ont dans leurs gènes sans pourtant en avoir demandé l’héritage. Du racisme à l’homophobie, de la prostitution à l’inceste, de la violence domestique à l’alcoolisme, tout jaillit dans une parole libre décortiquée de toute violence.

Bénédicte Belpois ou la sage-autrice pour panser les âmes au cœur des mots.

Gonzalo et les autres – Bénédicte Belpois – Éditions Gallimard – Janvier 2023

mardi 3 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
L’Alchimiste de Sant Vicens
Hélène Legrais

 


On ne peut pas dire que le jeune retraité de l’Éducation nationale André Escande est un homme à l’esprit ouvert… Certes, nous sommes dans les années cinquante mais tout de même, une certaine évolution souffle surtout quand on habite dans le quartier Saint-Gaudérique à Perpignan, juste à côté de l’atelier de céramique de Sant Vicens créé par Firmin Bauby. Jean Lurçat vient d’y peindre une fresque flamboyante et Pablo Picasso fréquente ce lieu. L’épouse d’André, la docile Suzanne, aimerait bien qu’André aille rendre visite à son voisin et prendre la température de ce lieu de création. Mais hormis ses mathématiques et son travail de recherche sur la Bible qu’il a entrepris pour occuper ses journées, point de salut. Il hait les extravagances de ce voisinage bruyant, ne supporte pas les jeunes éphèbes qui traversent le parc de Sant Vicens et ne veut surtout pas que sa femme en franchisse les grilles. La pauvre épouse se console dans sa roseraie et en écoutant les chansons du moment comme celle de Charles Trenet (son mari, bien évidemment ne jure que par Bach et non par ces variétés décadentes).

Cela n’empêche Suzanne d’inventer des stratagèmes pour aller se faufiler dans l’atelier, jusqu’à aller créer une assiette. Mais chut, faut pas qu’on le dise 😉

Mais l’arrivée de Vivi, une petite fille autiste va tout changer. C’est là que commence le pouvoir des arts, de la terre et des signes invisibles…

Comme très souvent dans l’œuvre – déjà fort importante – d’Hélène Legrais tout commence doucement pour, soudain, se transformer en un captivant roman où la noblesse des sentiments se termine en haie d’honneur.

Tout pour plaire aux lecteurs – sauf ceux qui ne jurent que par un certain snobisme condescendant – avec en bonus toute le charme du pays catalan et ses particularités régionales, à commencer par sa langue et sa gastronomie. Sans appartenir nullement au « feel good book » ce roman charme de toute part grâce aux personnages de Suzanne puis de Vivi et à la plume si sensible de la Senyora Legrais. S'ajoute un formidable hommage à Firmin Bauby, personnage haut en couleur et qui a laissé une empreinte indélébile dans le monde de l'art.

L’Alchimiste de Sant Vicens, un peu de tendresse dans un monde de rudesse.

L’Alchimiste de Sant Vicens – Hélène Legrais – Éditions Calmann Levy/Collection Territoires – Novembre 2022

lundi 2 janvier 2023

 

Une noisette, un livre
 
Champigny, l’insoumise
Léandre Boizeau

 


 

Ayant terminé l’année avec l’excellente anthologie sur les autrices effacées de l'histoire, votre serviteur ne pouvait que commencer de la même façon, en mettant en lumière une femme balayée par les mouvements médiatiques et autres sphères, qui a pourtant côtoyé des célébrités et eu un parcours atypique : Irène Champigny. Ouvrage découvert lors du salon du livre de Vierzon (où je vous recommande de porter vos pas en 2023) et qui a su me séduire par sa richesse informative tout en étant d’une extrême sobriété.

Né dans l’Indre, élevée en Touraine, Champigny (on l’appelait par son nom) va s’émanciper dans le Paris des années 20, dans le quartier de Montparnasse précisément. Menant une vie très libre au milieu des artistes, elle épouse tout de même le peintre Christian Caillard et ouvre une galerie qui aura pendant quelques années une grande renommée. Mais avec le temps…tout s’en va. Divorce, remariage avec une brute épaisse, puis en couple avec une quasi-sauvageonne, elle brûle la chandelle par les deux bouts. Pourtant, elle a un amant de cœur qui se nomme Robert Denoël. Amour platonique, l’un et l’autre hésitant à tour de rôle de s’élancer dans les relations charnelles. Créateur des éditions qui porteront son nom – auparavant a commencé avec le nom des 3 magots avec un associé américain – il aura une fin tragique qui restera mystérieuse. Pourtant Denoël refusera toujours de l’éditer au grand désespoir de Champigny dont le talent était certain. Malgré la pléthore de rencontres (André Malraux, entre autres, lors de la Résistance), elle sera seule – excepté Jean Brunel qui fera montre de fidélité – abusera des drogues et terminera sa vie dans la misère. Quant à Barjavel qui lui doit tant, il la balayera de ses mémoires…

Champigny, l’insoumise – Léandre Boizeau – Éditions La Bouinotte – Novembre 2020

 

 

dimanche 1 janvier 2023

 Une noisette, une nouvelle année


Chemin de campagne dans le Boischaut sud berrichon  © Squirelito






Depuis le Coeur de France, le Domaine de Squirelito souhaite à toutes ses lectrices et à tous ses lecteurs une très belle année 2023, avec non seulement des livres mais également une douce sérénité pour effacer ombres et tourments. 

Que vos rêves deviennent réalité, que les sourires se reforment sur les visages des corps blessés, que le chant des oiseaux gagne sur les cris des bombes, que des rires de joie surpassent les pleurs de la souffrance. L'humanité, comme le disait l'écrivain du bonheur Jean d'Ormesson, est une vallée  de larmes et une vallée de roses. Que les épines nous apprennent à être plus forts et à ne semer que des graines qui font éclore les fleurs. Chassons les souffles négatifs, résistons aux egos et à la superficialité, ne soyons pas indifférents à l'indifférence mais acceptons les différences ; l'union des  bonnes ondes ne peuvent qu'en créer d'autres. 

Sachons aimer ce que la vie nous apporte en cadeaux, du cui-cui du rouge-gorge au doux bruissement du feuillage des arbres. Respectons cette terre qui nous fait l'honneur de tous nous héberger, apprenons à ménager ses efforts pour éviter ses colères. 

Ne tombons plus dans les enthousiasmes sans lendemain ou/les les attristements médiatiques mais posons calmement et durablement nos sentiments. Regardons les autres plutôt que notre reflet, tendons la main sans attendre à demain et apprenons que les autres sont nos richesses. 

Et enfin, partageons nos élans d'optimisme pour vaincre les faiseurs de peur, profitons de la vie en oubliant les larmes sauf celles qui viennent de la joie. Rions, oui rions car l'humour est la meilleure des armes pour déstabiliser toutes les afflictions. 

Courage à ceux qui en ont besoin, santé à ceux qui l'ont perdue, envoie d'espoir pour les désespérés ; remerciements infinis pour les êtres qui nous libèrent et nous empêchent de jeter la noisette.

 Lumière toute pour élever des haies d'honneur au rayonnement humain, au rayonnement du vivant. 

En vous remerciant du fond du panache,

© Kathleen L. Ryan




  Noisette romaine L’ami du prince Marianne Jaeglé     L’amitié aurait pu se poursuivre, ils se connaissaient, l’un avait appris à...