Souvenirs d'un médecin d'autrefois

dimanche 18 février 2018


Une noisette, un livre

 

 

Dans les angles morts

Elizabeth Brundage


 

 

Des âmes sombres, un paysage gris, une ferme abandonnée, des fantômes, des cris, des pleurs, des doutes… et un crime. Elizabeth Brundage, en peintre des mots, a mis tous les composés pour peindre et ausculter tout ce qui peut amener un être humain à l’inimaginable. Mais peut-on parler de roman noir lumineux ? Probablement avec cette fresque « Dans les angles morts » car la noirceur des contours et de l’un des personnages principaux est enveloppée d’une plume brillante qui fait rayonner les facettes tourmentées et obscures d’un animal appelé Homo Sapiens.

Georges Clare, un universitaire issu de la bourgeoisie newyorkaise achète une ferme dans le Colorado sans dire à sa femme, Catherine, que les précédents propriétaires se sont suicidés. Huit mois plus tard, George passe chez ses voisins pour leur dire qu’il vient de trouver son épouse assassinée en rentrant chez lui mais que leur petite fille Franny est saine et sauve. Que s’est-il réellement passé ? Le shérif Travis Lawton soupçonne de suite le mari, mais la réalité sera plus abstraite que les apparences…

A partir du meurtre l’auteure repart en arrière afin de croquer les différents chemins de vie de chaque protagoniste faisant de cette histoire sombre un thriller psychologique aux touches pigmentées pour offrir au lecteur une palette vertigineuse, allant d’un psychopathe déconcertant jusqu’aux formes d’un ectoplasme.
Le tout nuancé par une écriture en glacis avec un savant équilibre entre l’ombre et la lumière, une plume imitant le pinceau du clair obscur pour mieux jouer sur les contrastes et ce qui oppose chaque personnage.

Une fresque intime qui donne une perspective sur les non-dits, les secrets, les blessures qui ne se referment jamais, les tourments de l’enfance, l’errance d’orphelins et la force des esprits pour à la fois humilier, cacher mais aussi combattre, continuer…

Le récit se termine encore plus magistralement qu’il avait commencé. Du Woody Allen sur papier pour un livre à encadrer !

« Tous deux étaient versés dans l’art. Des passionnés d’histoire, qui admiraient l’authenticité. Ils étaient sensibles à la beauté, à l’élégante géométrie de la composition, à la matière capricieuse qu’était la couleur, au spectacle de la lumière. Pour George, le trait constituait la narration ; pour Catherine, c’était une artère reliée à l’âme. »

Dans les angles morts – Elizabeth Brundage – Traduction : Cécile Arnaud – Quai Voltaire pour les Editions de La Table Ronde – Janvier 2018-02-18

Livre lu dans le cadre du Grand Prix des Lectrices Elle 2018

Aucun commentaire:

  Noisette intime Le silence des ogres Sandrine Roudeix   "Il y a des romans qui sont comme des forêts. On les regarde de loin....