Une noisette, un livre
Ceux d’ici
Jonathan Dee
Il y a les autres, de plus loin, touristes,
curieux... Et puis ceux d’ici. De là, d’Howland, petite commune du
Massachusetts où chacun vit comme il peut, avec ses problèmes et ses petites
tentations. Mais le rêve américain n’est plus qu’un mirage, la réalité à
laquelle va s’affronter Mark et l’ensemble de sa famille.
Le récit commence brutalement, tant sur le
fond que sur la forme avec une écriture dure, sèche, injurieuse, négative mais
nous sommes le lendemain du 11 septembre 2011. Deux types ont rendez-vous avec
un avocat d’affaires pour tenter de récupérer un peu d’argent sur les
escroqueries en ligne dont ils on été victimes. L’avocat est absent, tout est
ralenti, comme un silence de morts, forcément... Ils n’ont plus qu’à rentrer
respectivement chez eux. L’un des deux est Mark Firth, entrepreneur en bâtiment mais
qui espère faire fortune, l’autre va en profiter pour lui voler sa carte
bancaire.
Une fois de retour chez lui, Mark va
rencontrer Philip Hadi, un milliardaire newyorkais qui veut effectuer quelques
travaux dans sa maison juste achetée d’Howland. Il deviendra ensuite maire de
la ville faisant comme bon lui semble avec ses deniers personnels. Mais des
opposants font entendre leurs voix, dont Gerry, le frère de Mark qui a laissé
son entreprise pour se lancer dans l’aventure immobilière… la suite à
découvrir…
Entre les parcours des uns et des autres,
c’est un enchainement sans fin qui agite tout le récit. Si l’écriture change de
ton, les situations décrites restent rugueuses à l’image de cette Amérique où
tout est permis, où tout est possible, où tout peut s’acheter, tout se
défaire, tout s’achever, où tout vaut quelque chose et quelque chose plus rien (« une maison c’était une valeur, pas
une histoire »). A chaque
description d’un cas individuel c’est tout le reflet d’une société qu’on
aperçoit, société sans limites du moment que le pouvoir politique et la
technologie s’entrechoquent, souvent pour le pire.
Si on ne peut progressivement pas se défaire
de la lecture, elle jette un froid, loin d’un regard visionnaire, le roman
plonge dans la réalité et un warning sonne dans votre tête. Parce que si
Jonathan Dee dépeint une société américaine cruelle, narcissique, agressive,
prête à dénoncer l’autre, rejetant son problème sur celui de son voisin, on
peut y voir, hélas, une copie de l’autre côté de l’Atlantique…Comme par exemple
« les périodes de crise faisaient
ressortir le mauvais côté des gens, et cet Internet, c’était un cabinet de
toilette géant où on pouvait se permettre de gribouiller toute la haine qu’on
voulait ».
Grandiose et pathétique.
Ceux d’ici – Jonathan Dee – Traduction : Elisabeth Peellaert – Editions Plon / Collection Feux Croisés – Janvier 2018
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