samedi 22 juin 2019


Une noisette, un livre


 Romy, une longue nuit de silence

Sarah Briand




« Que ceux et celles
qui l’ont aimée
et l’aiment encore
aient une pensée pour elle »
Alain Delon

Romy Schneider s’est éteinte dans la nuit du 28 au 29 mai 1982 en emportant avec elle le secret de ses dernières heures et en laissant pour son public et tous ceux qui l’ont aimée des films inoubliables. Elle s’est endormie pour rejoindre le monde des étoiles, elle qui fut une star du cinéma. Ce firmament où se retrouvent pour l’éternité les âmes parties de terre et, où peut-être, les êtres chers se rejoignent ; puisse pour Romy avoir pu embrasser à nouveau l’être le plus cher à son cœur, celui qui a été son bonheur et l’une de ses raisons de vivre et de ne plus survivre : son fils David.

Car derrière cette silhouette, derrière cette voix, derrière la beauté de ce visage, l’éclat du sourire masquait le crépuscule de l’âme, beaucoup d’ombres, trop d’ombres ont plané sur la trop brève vie de Rosemary Albach. De blessures en blessures, d’amours perdues ou retrouvées, s’agitait un cœur excessivement meurtri par la tragédie d’un destin.

La journaliste Sarah Briand a choisi cet angle pour peindre le portrait de l’actrice en utilisant toutes les palettes possibles des nuances de l’écriture, en maniant la plume comme un pinceau, posant des petites touches délicates et pudiques pour mettre en lumière toute la sensibilité de l’artiste tout en incorporant des ombres scripturales pour permettre au lecteur de saisir la funeste vie d’une femme qui voulait tant aimer et tant donner.

Le récit alterne entre la description de la terrible nuit du 29 mai 1982, et des jours suivants,  et la progression cinématographique de l’actrice autrichienne, de ses premiers pas dans ce rôle de Sissi qu’elle a toujours détesté jusqu’à son dernier film tiré de l’œuvre de Joseph Kessel « La passante du sans-souci », là où intervient cette déchirante scène avec le jeune acteur Wendelin Werner, où ce n’est pas « Elsa qui pleure mais Romy ».Sans oublier le fil conducteur, le personnage qui vit toujours dans les pas de Romy Schneider : Alain Delon, sans oublier pour autant l’un des autres hommes de sa vie, Daniel Biasini.

Une narration qui laisse le lecteur dans une singulière émotion. Emotion par le destin brisé d’une actrice aux mille sensibilités, émotion par le parcours à coups de succès et de drames, émotion par la disponibilité d’Alain Delon à raconter à l’auteure ce qu’il n’a jamais révélé jusqu’à présent, émotion par l’écriture d’une délicatesse inouïe de Sarah Briand, comme si chaque mot était une note dans un long hommage en forme d’adagio.

Le premier ouvrage de la journaliste sur Simone Veil était une révélation d’élégance et d’atticisme pour dépeindre l’une des femmes les plus emblématiques du vingtième siècle. Ce nouvel opus sur Romy Schneider poursuit le même chemin et fait honneur à ces femmes hors du commun.

« Alors qu’elle l’enlace maintenant qu’elle est morte, Romy pourrait se demander combien de fois sa mère a accompli ce geste depuis son enfance. Chercher aux confins de sa mémoire ne sert plus à rien, mieux vaut garder les souvenirs heureux, l’odeur de ses toilettes ou de sa peau contre son visage lorsqu’elle l’embrassait pour lui dire au revoir,de son parfum lorsqu’elle sortait de scène ou lorsqu’elle rentrait de tournage, après ces longues heures où Romy patientait en espérant son retour » 

« Romy rit parfois pour ne pas pleurer »

«  La traque a commencé. Elle peut désormais reconnaître ces regards qui scrutent sans relâche les malheurs des êtres. Ils errent comme des vautours autour de la chapelle de l’hôpital de Saint-Germain-en-Laye où David attend dans son linceul le dernier hommage que sa mère a organisé pour lui ».

« C’est tout le paradoxe de sa vie, Romy aime ces moments où elle est seule, elle les recherche parfois pour s’isoler du monde et se sentir apaisée. Et en même temps, ces instants de solitude peuvent aussi la précipiter dans une mélancolie au cours de laquelle les souvenirs de son fils viennent la heurter ».

« C’est dans les rencontres, les moments de bonheur et les plus grandes douleurs que se construit un destin ».

Romy, une longue nuit de silence – Sarah Briand – Editions Fayard – Mai 2019



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