Une noisette, un livre
Les mains du miracle
Joseph Kessel
Si
mains miraculeuses il y a, écriture prodigieuse aussi. Relu à nouveau ce roman
de Joseph Kessel et qui encore m’a mis au bord des larmes. Parce que l’humanité
y coule à chaque instant au milieu de l’enfer de la deuxième guerre mondiale et
dans l’antre de l’un des hommes les plus puissants (et forcément cruel) du III°
Reich, l’un des architectes de « La solution finale » : Heinrich
Himmler.
Mais
un jour de mars 1938 le diable a
rencontré un ange : Félix Kersten, médecin né en Estonie, de nationalités
finlandaise et suédoise et qui a été jusqu’à la fin de la guerre le
thérapeute du sinistre maître absolu de la SS.
Joseph
Kessel livre un récit bouleversant de cette rencontre inattendue et rend un
vibrant hommage à un homme qui a dépassé largement ses fonctions de soignant,
sauvant plus de 800.000 vies grâce à la confiance qu’Himmler lui accordait car
seul le Dr Kersten pouvait le soulager de ses douleurs par des massages. Dans
ces moments d’intimité, c’était le temps de la confidence, des échanges
surréalistes et de l’incroyable pouvoir de Félix Kersten sur un homme pris dans
l’étau du mysticisme, de l’adoration hitlérienne et d’un orgueil incommensurable.
Un
roman basé sur les mémoires du médecin qui est devenu progressivement le
messager secret de la diplomatie internationale et qui a fait preuve d’un
héroïsme sans limite pour parvenir à épargner des milliers de vies. S’il avait
des ennemis au sein de la Gestapo et du régime nazi il a pu compter sur
quelques êtres qui n’avaient pas totalement rangé leur âme dans les profondeurs
du pandémonium hitlérien, notamment Rudolph Brandt, le secrétaire particulier
d’Himmler. Sans cet homme il aurait été impossible à Kersten de mener à bien
ses plans de sauvetage. Malgré la plaidoirie du médecin en faveur de Brandt, il
a été pendu lors du procès de Nuremberg et c’est là qu’on s’aperçoit que toute
justice n’a pas été rendue. Brandt était loin d’être un saint mais d’autres
bourreaux (et non des moindres) ont pu
s’échapper voire refaire leur vie en toute impunité.
Felix
Kerstern n’est pas le seul être humain à avoir en toute discrétion tenté
l’impossible face à la mort. On pense bien évidemment à Oskar Schindler, à tous
les Justes, à tous les anonymes qui, depuis que les guerres existent, agissent
dans l’ombre pour faire ressurgir la lumière à des êtres humains perdus dans
les catacombes de l’inhumanité. Non seulement continuer à leur rendre hommage
mais parler de ces âmes qui font croire en l’humain et qui permettent à une
civilisation de pouvoir continuer à porter dignement ce nom.
Les
mains du miracle ou le triomphe de la médecine et de l’humanité
Les mains du miracle –
Joseph Kessel – Editions Gallimard / Folio
Felix Kersten (1898 - 1960) |
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