mercredi 20 juin 2018


Une noisette, un livre

 

Théodora, prostituée et impératrice de Byzance

Virginie Girod


 

La fille de l’hippodrome de Constantinople, la fille du dresseur d’ours, humble parmi les humbles ne pouvait imaginer qu’un jour elle épouserait Justinien et, deux ans plus tard, en 527, deviendrait impératrice de Byzance.

Véritable mythe, elle n’a cessé de susciter admiration et haine. Admiration parce qu’elle fut une femme exceptionnelle, féministe avant l’heure ;  haine parce que jalousée pour sa beauté et rejetée pour son passé, celui de danseuse et courtisane. Son plus fervent détracteur a été Procope de Césarée et la plupart des sources écrites viennent de lui. D’où la délicate tâche de mener une biographie de Théodora.

Virginie Girod, spécialiste de l’histoire des femmes et de la sexualité dans l’Antiquité, s’est lancée dans cette gageure en prenant soin d’extraire tout ce qui semblait absurde et dénué d’authenticité en essayant de recouper les faits avec d’autres sources.

Cette biographie est non seulement un portrait stupéfiant de Theodora mais aussi une plongée dans ce monde antique où s’élève une nouvelle civilisation après la chute de l’empire romain. Instructif, d’ailleurs, de voir que les opprimés d’hier sont souvent les bourreaux du lendemain, ce que les chrétiens avaient subi sous Rome, les païens eurent ensuite les mêmes traitements… Captivant, également, cette étrange modernité de Byzance, certaines idéologies des siècles suivants se sont sûrement inspirées de ces préceptes du monde ancien…

Quant à Theodora, son parcours est à couper le souffle. Issue de milieux populaires, danseuse et, logiquement, prostituée, il lui a fallu une force, un courage, une détermination, pour arriver à franchir tous les carcans de la haute société, pour passer des lambeaux à des vêtements de pourpre. D’une grande beauté, elle a su jouer de ses charmes mais est devenue la plus fidèle des épouses en se mariant avec Justinien. Ensemble, ils ont mené une politique commune, une avancée en symbiose et quelques mesures humaines en faveur notamment des prostituées. En toute logique, Theodora n’allait guère dans les sentiments, pour pouvoir résister et assurer sa position, elle se montrait impitoyable voire cruelle. Elle n’en reste pas moins fascinante et peut être classée parmi les premières féministes de l’Histoire par son énergie à vouloir être libre et insoumise.

Formidable revanche sur le destin pour cette ancienne courtisane, qui à l’instar des acteurs, mimes, danseurs étaient frappés d’infamie et n’avaient droit à aucune dignité. Elle est devenue un mythe et est encore célébrée parmi les Chrétiens d’Orient.

Théodora, prostituée et impératrice de Byzance – Virginie Girod – Editions Tallandier – Mars 2018

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