mardi 22 septembre 2020

 

Une noisette, une rentrée littéraire #18
 
Les Lumières d’Oujda
Marc Alexandre Oho Bambe

 


Un titre de roman à l’image des mots qui défilent, virevoltent, s’accrochent autour d’un crépuscule pour secouer l’humanité vers une aube d’espérance. Un livre qui parle, qui slam, qui puise au plus profond de l’être humain pour en faire jaillir le meilleur.

Mano, le héros est à Rome, pour peu de temps. Il est rattrapé par la police et reconduit dans son pays natal, le Cameroun. Déçu, il retrouve néanmoins l’amour de sa grand-mère Sita, celle qui lui a inculqué toute la bienveillance pour l’offrir au monde. Puis, il s’engage dans une association qui œuvre à la fois pour les réfugiés mais également pour éviter les départs qui se soldent trop souvent par des échecs voire des tragédies, la Méditerranée devenant le plus grand cimetière humain en ce XXI° siècle. De là, il ira au Maroc, il s’associe au père Antoine qui aide les échoués des errances et tombe amoureux d’Imane, femme libre qui a pour binôme sa sœur jumelle Leïla, puis ira au Liban, en Grèce, en France pour apporter son témoignage et construire un réseau d’entraide au-delà des frontières.

Cette épopée faite de larmes et d’espoir est un chant d’humanité, une déclaration universelle des droits de l’homme, une signature pour la liberté, un hymne à l’amour et un appel à la solidarité. Sans oublier la beauté du verve face aux désordres du monde.

Marc Alexandre Oho Bambe c’est un écrit qui claque mais pour construire et non pour détruire.

C’est une plume rebelle mais sans haine.
C’est le jour et la nuit qui rassemble les bras des étoiles pour éclairer nos âmes.
C’est un cri de révolte tout en donnant de l’espoir.

Migrant, réfugié, blessé sans frontières, peu importe le vocable que la société va te coller au dos, tu es avant tout un être humain.

Qui fuit, sans fuir.
Qui résiste dans le silence.
Qui veut vivre. Vivre mieux. Libre et sans guerre. En mangeant à sa fin.

Seulement la grande faucheuse est  sans pitié. Comme les passeurs qui profitent de ta détresse. Combien de disparus, combien de morts ? Combien retournent à la case départ ?Combien se retrouvent dans la même misère ?

Pourtant, le rêve existe. Il peut devenir réalité.
Il suffirait parfois d’une main, d’un geste.

Ce geste est dans ce livre. Multiplié en phrases, en rythmes. Capitaine Alexandre est maître de son âme par la poésie qui inonde tout autour de lui.

Aider n’est pas un sprint, c’est « une course de fond ». Comme ce roman qui est chemin à suivre, à adopter, à partager. Pour une humanité avant toute chose.

Superbement humain. Humainement superbe.

«Je m’étais engagé. Dans l’association d’Aladji, luttant pour éviter les départs vers les cimetières de sable et d’eau. Le désert et l’océan sont pleins de nous, poussières de nègres. Noires étoiles. Filantes ».

« J’ai pleuré devant leur courage, leur rage d’exister et leur folie d’espérer. Encore. Traverser. Y arriver. Fuir la misère et la faim promises par des Etats qui n’en sont pas. Des Etats indignes de leur jeunesse exsangue, jeunesse qui n’en peut plus, de suffoquer et d’être obligée de faire comme elle peut, jamais comme elle veut ».

« Je redécouvrais en fait ce que je savais déjà : notre humanité est en guerre contre elle-même. Et les plus faibles en meurent chaque jour, chaque nuit. Dans une indifférence sidérante ».

« Vivre libre est une quête, une conquête même, qui dure toute la vie ».

 « Ciel couleur d’orange
Criblé d’espoir
Que je cultive
En marchant sur la Terre
Tant d’émotions Et de mois du monde
Dans ma voix qui silence
Je parle pourtant
Parler, c’est d’abord écouter
Oui, écouter, écouter l’autre
L’autre qui a toujours
Quelque chose de nous
Et quelque chose à nous dire aussi
Nous dire d’elle, de lui
De son île à elle, à lui, de son pays, de sa culture
De ses bonheurs, de ses malheurs
De sa mémoire, de son histoire ».

Les lumières d’Oujda – Marc Alaxandre Oho Bambe – Editions Calmann Levy – Août 2020 – Rentrée littéraire 2020

 

 

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