Noisette
biographique
Les vies rêvées de la baronne
d’Oettingen
Thomas Snégaroff
« Qui, un jour, se
souviendra de moi ? »
Paul
Éluard aurait écrit qu’il n’y a pas de hasard mais que des rendez-vous.
Assurément, cachés dans un bureau, papiers, manuscrit anonyme et trois portraits de Dmitri Snégaroff
peints par une certaine Françoise Angiboult attendaient tranquillement qu’une
main les découvre un jour. Cette main est celle
de l’arrière-petit-fils de l’imprimeur russe : Thomas Snégaroff. Quant à
la mystérieuse Françoise Angiboult, elle était tout simplement la
« baronne » d’Oettigen qui s’inventait moult vies pour fuir la
réalité. Mais qui étiez-vous Hélène d’Oettingen ?
Thomas Snégaroff peint un tableau livresque tout en nuances et en couleurs malgré les nombreuses teintes grises – et carrément noires à partir des années 30 – qui ont jalonné la vie de cette inclassable. Née en Ukraine sous le nom de Miontchinska, la date réelle de naissance et le nom de son géniteur resteront un mystère. Elle se plaisait à dire que son père était François-Joseph… quand on s’invente une vie, autant que ce soit grandiose ! Après une brève union avec le baron et officier du star Otto von Oettingen elle part en France : l’oiseau éprit de liberté ne pouvait se retrouver sous le joug d’un époux. L’argent continue de couler à flots, la belle s’entoure d’amants et de luxe, profitent de soirées interminables entre artistes et rêve, rêve, rêve. Seule échappatoire à ses soubresauts psychiques, à son spleen, à ce désir d’amour tout en quittant ses amants de peur qu’ils s’attachent trop à elle et en souffrent. Du talent, elle en avait à revendre, trop peut-être pour être admise.
Le journaliste retrace ce parcours avec brio et fantaisies entre les frasques d’un Modigliani, la verve d’un Apollinaire et du moderne Survage, entre autres. Toute une époque ! Quant à cette femme, que de paragraphes lumineux pour lui redonner vie, la faire ressurgir de l’oubli. Une réussite.
« Je suis féministe et je ne reconnais pas l’autorité d’un homme ! Hélène, qui ne supporte pas cette distinction factice entre les hommes et les femmes, va encore plus loin : elle n’apprécie pas non plus l’autorité d’une femme sur un homme. »
« Autant Hélène jette les hommes qu’elle a aimés et qu’elle aime encore dans les bras d’autres femmes, autant elle ne veut pas les prendre à d’autres bras ».
Les vies rêvées de la baronne d’Oettingen – Thomas Snégaroff – Éditions Albin Michel – Novembre 2023
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