Une
noisette, un livre
Les
Bons Enfants
Martine
Chavot
Lire
c’est s’offrir un doux plaisir. Mais pas que. Lire c’est aussi apprendre :
connaître le monde, son présent, son passé ; les heures glorieuses et les
heures honteuses. Comme celles de ces maisons de redressement ou de correction
(plus juste vu les moult châtiments qui sévissaient) ou encore appelées
colonies pénitentiaires comme celle de Mettray dans l’Indre-et-Loire où
séjourna, entre autres, Jean Genet de 1923 à 1926.
Moins connue mais tout aussi – voire plus – terrifiante, la colonie pénitentiaire agricole du Val d’Yèvre, près de Bourges, fut le théâtre de scènes tragiques de 1847 à 1924. Martine Chavot, par la voie de la fiction, rend hommage à ces enfants et adolescents brisés par la dureté du « redressement » prodigué.
Le livre s’ouvre avec les obsèques de Joseph, un adolescent qui serait tombé dans l’escalier…selon la version officielle. À la colonie, personne ne le pleure. Sauf Le Cagneux et Denis, ses copains, des enfants perdus pour cause d’une société qui ne prête guère attention aux miséreux. Pourtant, dans chaque humain un cœur continue de battre.
Denis père est le narrateur. Puis Denis fils. C’est à ce moment là que le roman devient encore plus bouleversant. Comme si les gènes imposaient une destinée cassée. Ou bien sont-ce les conditions de vie qui se perpétuent dans la société ? Denis père chassé de la ferme pour un vol qu’il n’a pas commis, Denis fils chassé de sa famille d’accueil parce qu’il n’a pas accepté qu’on brise le seul objet qui lui restait de sa mère.
À chaque époque, des rêves envolées, des idéaux en mouvement. Ce qui reste intacte c’est le refus de se soumettre, de rompre les inégalités et de vivre libre.
Un beau roman écrit avec beaucoup de sensibilité et une plume qui s’est amusée à laisser quelques traces énigmatiques.
Les Bons Enfants – Martine Chavot – Éditions La Bouinotte – Février 2023
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