Une noisette, un livre
Feu pour feu
Leye Adenle
Une
nouvelle fois, Leye Adenle nous embarque à Lagos mais ce n’est en rien une
promenade touristique. Plutôt un circuit bien sombre au milieu des politiques
sans aucun scrupule, des trafiquants dans toute leur ignominie et des femmes
exploitées jusqu’à leur dernier souffle, dernier souffle qui est rarement
d’origine naturelle… Mais quelques passages s’éclaircissent lorsque
l’inspecteur Ibrahim et l’avocate Amaka essaient de ramener de la justice et de
l’humanité dans ce labyrinthe de tous les excès de la tentation, du pouvoir, du
sexe et de l’argent.
Au milieu des embouteillages quotidiens de la plus grande ville du continent africain, un jet-privé s’écrase sur une résidence d’un quartier haut de gamme. A son bord, le principal candidat au poste de gouverneur, sa maîtresse et l’ex de sa maîtresse. Curieusement, la résidence qui « reçoit » l’appareil est justement celle du chief Adio Douglas…Rapidement un autre candidat lui succède dans la course électorale : chief Ojo, ce dernier étant la parfaite illustration du salaud de première classe. Amaka veut absolument le coincer mais ce sera plus compliqué que prévu à cause d’un sac volé et d’un certain Malik et son mystérieux « harem » dans une forêt inconnue…
L’écrivain nigérian ne cherche pas à faire de l’ornementation par une dentelle de mots. Non, il hache directement pour trancher dans le cœur d’une société où la vergogne est calfeutrée dans un placard poussiéreux. Le résultat est captivant, haletant avec aucun risque d’un bâillement en cours de lecture. Dialogues percutants mais brefs comme pour illustrer la rapidité avec laquelle il faut agir lorsqu’un danger est grave et imminent.
Comme
pour Lagos
lady Leye Adenle défend la cause des femmes en faisant d’Amaka un
personnage déterminé à porter haut et fort le drapeau de la lutte contre la
corruption et la prostitution dans ce
Lagos en proie à toutes les dérives humaines. A côté, une intrusion dans les
coulisses des arrangements politiques où tous les coups sont permis. Au Nigeria
comme ailleurs quand l’argent rend fou et dirige les âmes.
« Alùjonù bì owò ò sì, déclara-t-il. Aucun esprit n’est plus puissant que l’argent. Il y en assez ici pour acheter des jets privés, de grandes propriétés à Osborne, el la monnaie suffirait encore à se procurer des centaines et des centaines de Mercedes. Et devant toutes ces choses, en les regardant, tu ne sentiras rien. Mais devant une telle somme d’argent, si ton cœur n’est pas assez fort, tu peux devenir fou. C’est à cause de l’esprit qui vit dans l’argent. L’argent, c’est le pouvoir. Pourtant, ce n’est que du papier ».
Feu pour feu – Leye Adenle – Traduction : David Fauquemberg – Mars 2020
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