mardi 6 novembre 2018


Une noisette, un livre


 La frivolité est une affaire sérieuse 

99 essais

Frédéric Beigbeder




Un peu d’impertinence, s’il vous plaît, nous sommes Français ! Frédéric Beigbeder agace ou séduit mais dans les deux cas de figure il ne laisse pas indifférent. « 99 essais » est une compilation de divers billets d’humeur publiés dans la presse par l’écrivain avec une particularité,  trois parties sont  mises en exergue : avant 2015, en 2015, après 2015. Et c’est ainsi qu’on mesure ô combien « la frivolité est une affaire sérieuse ». Même salutaire.

Aussi éclectique que possible, Frédéric Beigbeder parle de tout et de rien, de sujets lourds et légers, mais toujours avec humour (sans se prendre au sérieux) et avec un cynisme que l’on pourrait qualifier de bienveillant. Une chose est irréfutable, si certains naissent dans les choux, ce natif du Béarn n’a pas vu le jour dans un arbre (malgré son admiration pour le cèdre du Jardin des Plantes) car il a banni à jamais la langue de bois ; que ça plaise ou non, il exprime ce qu’il a envie de dire, il livre ses opinions en mettant le politiquement correct aux rayons des accessoires inutilisables.

Littérature (qui «est avant tout une conversation »), cinéma, fashion-week, alcool (voire cigarettes et p’tites pépées), vie nocturne, sexe, tout y passe sans trépasser. Sauf quand il évoque avec une infinie tendresse la disparition de Jocelyn Quivrin et Jean d’Ormesson. Et puis, il y a 2015. Même si avant il y a eu 2001. 1995 aussi. En France, en Europe, en Asie, en Afrique, en Amérique. La réponse de l’auteur est sans appel, cinglante et lucide, tout y apportant comme toujours de l’ironie qui parfois est également « la politesse du désespoir », une arme aussi, et celle-ci sans faire de victimes. Une arme non létale, au contraire, elle a pour but de faire renaitre, de ne pas oublier que « Paris est une fête ».

Cela dit, Frédéric Beigbeder a sa bête noire (qui n’en n’a pas ?), je nomme Internet et les réseaux sociaux (entre nous ses initiales sont quand même FB…) : « La vindicte de ce monde virtuel qui semble avoir été créé pour permettre à tous les haineux du monde de se donner la main ». C’est joliment exprimé et on ne peut lui donner tort. Sauf, qu’il existe heureusement, l’autre versant, peut-être moins mis en lumière mais où on peut avoir le monde au bout des pattes avec des échanges cordiaux. Mais cette violence virtuelle est ni plus, ni moins, que le reflet d’une société ; le romancier a encore une phrase terriblement juste « La violence n’est pas un discours ou une langue ; la violence commence là où disparait le vocabulaire ». Quand on ne sait plus quoi dire, on frappe, quand on est en manque d’arguments, on agresse.

Alors avant toute chose, de la LITTERATURE, pour « humaniser l’inhumain », pour narrer l’inénarrable (Frédéric Beigbeder, si un jour vous me lisez, je l’ai mis pour un ajout page 93), pour continuer à s’exprimer à sa guise, pour quelle soit le réverbère du fil de la liberté avec un funambule de la désinvolture, de la fantaisie (sans divins mensonges), de la légèreté. Cette légèreté si soutenable des êtres. 

« L’écrivain est toujours un funambule qui titube entre le ciel et la terre ».

« Quand fera-t-on ENFIN la distinction entre ce que pense l’auteur et ce que disent les personnages ? »

La frivolité est une affaire sérieuse – 99 essais – Frédéric Beigbeder – Editions de l’Observatoire – Octobre 2018





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