Une noisette, un livre
Objet trouvé
Matthias Jambon-Puillet
Votre
serviteur au pelage cuivré a ouvert et commencé ce livre avec une certaine
appréhension, allait-il vers un gang-bang littéraire ? Le résumé
m’apprenait que j’allais pénétrer dans le milieu des pratiques sexuelles
alternatives, et ainsi, je devais bien prévenir mes petites cellules grises que si je
lisais des passages sur la promenade d’un gland il ne s’agirait en aucune façon
du fruit du chêne. Donc, de la décontraction avant toute chose sans se faire
fouetter les noisettes.
Nadège
était fiancée à Marc. Le jour de l’enterrement de la vie de garçon de Marc, il
disparait mystérieusement. Nadège, enceinte refait sa vie avec Antoine. Quelque
temps plus tard, Enzo est né sans son père géniteur. Jusqu’au jour où l’ex
beau-père de Nadège lui téléphone pour lui dire qu’on a retrouvé Marc, sans
aucune précision. Par la police, elle apprend avec stupéfaction qu’il était
gisant dans un appartement, entièrement nu avec seulement le sexe comprimé dans une ceinture de
chasteté. Dans une pièce voisine, une femme, Sabrina, gainée de cuir et morte…
Nadège va enquêter et tenter de comprendre.
Un
roman qu’on ne peut juger qu’à la dernière page. Matthias Jambon-Puillet a la
délicatesse d’amener le lecteur progressivement dans ces pratiques obscures,
sans forcer sur le glauque, sans tomber dans une vulgarité trop facile. Il y a
même de l’élégance car avant tout c’est l’amour qui survole les pages. Aucune
réelle violence car l’auteur prend soin de créer un récit où les relations sont
consenties, elles sont voulues de part et d’autre, non forcées. Et c’est
certainement ce qu’il y a de plus important dans l’histoire : orienter ses
désirs sexuels avec la condition d’une liberté totale et d’une confiance réciproque.
On est loin de scènes orgiaques. Après tout, « Où l’amour met son pied
vainqueur/Ah c’est la torture suprême/Qui donc commande quand il aime »
(1).
S’ajoutent
de beaux effets de surprise, une écriture souple et une subtile combinaison
entre la psychologie des personnages et les fantasmes insoupçonnables des
adeptes du BDSM.
Un
univers qui restera loin de mon arbre mais on peut qualifier cet «Objet trouvé »
de lecture pas perdue, hors de toute contrainte.
« Imaginer Marc
avec une autre lui coûte déjà tant, alors incorporer ces éléments, ces objets
dont elle ne veut pas comprendre l’utilisation, c’est trop. Mouvement en
arrière, elle ne peut pas appréhender autant d’informations. Son cœur bat fort,
lui tape contre les temps comme autant d’incessantes et rythmiques petites
gifles. Elle recule jusqu’au lit, se laisse tomber au sol, s’adosse contre le
bord du matelas. Elle se concentre sur sa respiration, fait abstraction de tout
le reste. Le calme revient par paliers. Elle tente de se lever quand sa main
d’appui heurte un petit objet qui s’en va rouler plus loin sous le lit. »
Objet trouvé – Matthias
Jambon-Puillet – Editions Anne Carrière – Août 2018
(1) Armand Silvestre et Léonce Détroyat
pour Henri VIII de Camille Saint-Saëns
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