Une noisette, un
livre
Amine
Mona Azzam
En
1994, Amine, avec ses parents et sa fratrie, vient d’arriver en France dans la
ville d’Annecy, un choc affectif et thermique : aucun ne parle français et
ce froid blanc est aux antipodes du Sahel d’origine. En pénétrant dans
l’enceinte du collège pour intégrer une classe de sixième, le jeune garçon a
l’impression que la montagne qui se dresse devant lui n’est pas seulement faite
de roches et de pierres, elle l’est également par ces regards scrutateurs, ces
attitudes hautaines à son égard, par l’immensité de ce qu’il entend mais ne
comprend pas. Cependant, il lui semble qu’un piton se dresse devant lui auquel
il pourra s’accrocher et s’élever sur la paroi de l’éducation nationale :
une femme parait bienveillante. C’est Madame Maya, elle est professeure de
lettres.
Elle le fait asseoir aux côtés de Théo. Progressivement, il deviendra son seul et unique ami. Ses progrès en français sont fulgurants, tous les espoirs sont permis en dépit des crevasses qui l’entourent. Vingt ans plus tard, il reçoit un courrier d’une notaire lui demandant expressément de la contacter au plus vite suite au décès de Madame Maya. De Marseille il va revenir sur son parcours en se remémorant celle qui lui a ouvert la voie.
Magnifique roman dans toute la phosphorescence de la bienveillance des êtres qui permettent de bâtir des destins hors norme, de ces personnes qui s’apparentent à des contreforts pour aider les autres à se construire malgré les renversements de l’existence. Dans un style épuré, sans ornement artificiel, Mona Azzam rend hommage à un professeur qui a permis à un déraciné de se construire avec succès. Sans négliger toutefois dans cette ode à l’humanité de souligner ceux qui tentent, pour de viles raisons, d’empêcher aux naufragés de la vie d’espérer et de réussir.
« Souvenirs. Méchanceté de l’enfance. Hypocrisies de l’enfance. Il faudra qu’Amine décroche le Prix de la nouvelle pour devenir un héros aux yeux de tous. De mes parents, par là même. Univers à deux extrêmes. Aucun juste milieu. La même main qui anéantit un jour, propulse un autre jour. Et vice-versa ».
« Rien n’est dû au hasard. Rien ne relève de la coïncidence. Tout est une question d’instants. D’instants déterminants, dont l’on s’empare. Et c’est tant mieux ».
Amine – Mona Azzam – Editions La Trace – Janvier 2022
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