vendredi 16 avril 2021

 

Une noisette, un anniversaire
 
Un endroit où aller
 

 


Un endroit où aller pourrait être un noisetier, un refuge pour s’approvisionner en bonnes choses quand tout semble éloigné, enfermé. Un noisetier qui a vite grandi, qui s’est épanoui en quelques mois faisant un lieu de rencontre, une place où chacun passe, chacun vient. Et y revient. Parce que les livres et ceux qui les écrivent sont les joyaux de la vie. Depuis un an, 19 heures est une sonnerie pour la relève d’une garde livresque avec les capitaines libraires et les artificiers écrivains, le monde de la littérature à portée de pattes, pour tous et partout. Votre serviteur a voulu fêter cet anniversaire et rencontrer la créatrice de ce lieu devenu incontournable pour des milliers de lecteurs : l’écrivaine – mais pas que – Frédérique Deghelt. Elle est rarement visible car elle passe la main à celle nommée désormais « La chevalier libraire », Nathalie Couderc.

·    Un endroit où aller fête son premier anniversaire, comment est née l’idée de ces rencontres en ligne ? Comment s’est constituée l’équipe des mousquetaires du livre ?

 L’origine de  l’histoire :

J’ai commencé par avoir le Covid en début de confinement puis quand je suis sortie au bout d’un mois de cet anéantissement, j'ai réalisé que mes trente dates de visite en librairie pour mon roman, Sankhara, sorti en janvier chez Actes Sud, étaient annulées. Que mon autre livre, Etre Beau, photos et texte réalisés avec la photographe, Astrid di Crollalanza, exposé au Musée de l’Homme était dans un lieu désormais fermé.

Face à ce désastre artistique, il y avait mes amis auteurs avec leurs livres sinistrés et les libraires désespérés… Sans conviction j’ai fait une rencontre sur une plateforme pour un organisme de conférences où il y avait 200 participants. 80 livres ont été vendus…

J’ai donc créé les Rencontres on line Un endroit où aller.

La première à laquelle j’ai parlé de cette idée c’était Nathalie Couderc. Parce que je lui fais totalement confiance sur ce genre de projet et sur tout ce qui concerne la littérature de façon générale. Tout de suite, je lui ai dit que ça n’avait pas l’air évident le côté technique avec certains libraires peu habitués au numérique. Elle a tout de suite proposé d’encadrer techniquement cette affaire et comme elle venait de fermer sa librairie, elle s’est finalement plus investie que je ne le pensais au départ (et certainement elle aussi) à ma grande joie. Je lui ai proposé de présenter pour rassurer les libraires, les auteurs et bien sûr avec l’idée qu’elle allait incarner un rendez-vous. On a commencé à faire une rencontre tous les soirs y compris le samedi et le dimanche. Et comme on travaillait super bien ensemble, on a continué. On est à la fois complémentaire et en accord sur l’ensemble.

Comme je suis une ex réalisatrice et coach d’émissions de télévision, j’ai voulu que ce soit esthétique et conçu comme une vraie émission de télévision autant dans l’aspect que dans le contenu. Or question lecture et contenu, Nathalie est à la fois exigeante et performante.

Nous vérifions la lumière, les cadrages, le son. Je briefe un peu les libraires sur l’animation exigée quand on n’est pas dans une librairie mais dans la situation d’être regardé sur un écran. Et Nathalie donne un rythme, un complément à l’animation des libraires qui sont pratiquement chaque soir différents.

Un endroit où aller avec des libraires, des auteurs et des lecteurs/spectateurs, était exactement ce qui nous manquait dans la période que nous vivions mais ce projet va bien au delà comme nous l’avons découvert ensuite…

Il fallait que ce soit techniquement facile donc nous gérons tout. Les auteurs et les libraires n’ont rien à faire, ils cliquent sur un lien et viennent raconter un livre et son écriture en ligne. 

Dans l’équipe, il y a eu au début mon fils Jules cinéaste qui a conçu l’habillage et le monteur des vidéos Charlie Meunier qui nous a rejoint ensuite. Depuis quelques mois Béatrice Jean, graphiste passionnée de littérature s’occupe des posts Facebook, du site et de Twitter pour que je puisse recommencer à écrire. Ma fille Lily gère l’Instagram. Béatrice Pasquer la créatrice de mon site Internet m’a largement aidée pour réaliser le site et le logo a été élégamment conçu par Aude Brisson. 

·         Le nom choisi est l’antonyme du mot confinement ?

C’est surtout ce qui nous manquait. Un endroit où aller pour parler de nos livres avec des libraires et en présence de lecteurs. C’est d’autant plus joyeux que ça s’oppose complètement à « numérique », « rencontre virtuelle » et autre faribole évanescente. Un endroit où aller, c’est concret, physique. Et puis c’est le nom de la collection qui m’a accueillie chez Actes Sud, la collection d’Hubert Nyssen. Et le nom d’un splendide livre de Robert Penn Warren.

·         En un an, combien d’auteurs invités, combien de moments inattendus ?

Les rencontres rassemblent chaque soir entre 200 et 4000 lecteurs en direct et nous fêterons le 16 avril la 200ème rencontre (donc plus de 200 auteurs invités puisqu’il y a eu certaines rencontres avec plusieurs auteurs)

Nous fêtons ces un an avec Nancy Huston qui vient de publier Arbre de l’oubli chez Actes Sud et avait écrit ce merveilleux essai L’espèce fabulatrice qui dit si bien pourquoi nous avons besoin de lire.

Depuis le 17 avril 2020 nous avons donc reçu plus de 200 auteurs de 50 maisons d’éditions différentes dans des rencontres animées par une soixantaine de libraires, quelques blogueurs ou journalistes.

Nous avons eu 25000 spectateurs pour le direct de Yasmina Khadra pour la 150ème.

Et surtout nous avons découvert un nouvel outil de promotion pour les livres. Car ce ne sont pas les mêmes lecteurs qui assistent à nos rencontres en ligne et à celles en librairie. Plus de jeunes, des personnes qui ne peuvent pas se déplacer ou ne sont pas libres à ces horaires, des lecteurs expatriés car nous avons toutes les libraires francophones qui sont partenaires.

Les rencontres en ligne un endroit où aller c’est 50 minutes chaque soir de la semaine pour assister à une discussion entre auteurs et libraires. Avec des auteurs très connus et d’autres pas du tout connus, nous pallions à la désastreuse règle qui veut que ce soit toujours les mêmes dont on parle.

Nous sommes partenaires de la Fondation Orangelecteurs.com avec lesquels nous faisons quelques rencontres à thème. Le prix Orange du livre, La soirée spéciale Prix BD, la soirée Spéciale Manga et d’autres…

Nous avons eu des soirées avec le SNE, le Goethe Institut, avec des petites maisons d’édition qui racontent leur parcours, avec des auteurs qui ne parlent pas le français et qui habitent très loin et ne viennent pas en France pour la sortie de leur livre… etc…

Nous sommes en train de mettre en place un partenariat avec la ligue du Québec.

Je ne pensais pas l’année dernière en créant ces rencontres que nous aurions ce succès et que nous ferions tant de découvertes qui font des rencontres en ligne une sorte d’émission littéraire à succès. C’est surtout ce que c’est devenu, l’inattendu… Sinon dans les moments on a eu parfois quelques frayeurs techniques mais rien de grave ou d’irrécupérable.

·         Comment se passe la connexion avec le public ?

Les lecteurs sont soit abonnés et reçoivent tous les liens s’ils veulent rejoindre la plateforme Un endroit où aller et poser des questions. Mais on peut aussi rejoindre la plateforme en  cliquant sur la mention ASSISTER A LA RENCONTRE sur chaque page d’annonce des rencontres sur notre site ou bien suivre la rencontre en direct sur notre page Facebook.

La rencontre est ensuite habillée par un monteur avec notre logo et mise en intégralité sur Instagram, également mise en lien sur twitter. Nous avons beaucoup de courriels et de lien avec des lecteurs et c’est Nathalie qui gère les abonnements à la plateforme.

·     Le partenariat, un outil essentiel, les livres ne peuvent survivre sans les libraires ? Permettre aux libraires de France et de Navarre de participer est aussi de maintenir non seulement un lien mais toute une filière ?

C’est encore plus large que ça car nous avons aussi des librairies francophones partenaires. Nous avons tout de suite eu un lien très fort avec le président des librairies francophones et comme nous avons bénéficié d’un article dans le journal des expats de Singapour nous avons pas mal de lecteurs qui sont loin de la France et également loin d’une librairie. C’est aussi valable pour des lecteurs dont la librairie n’est pas tout près en France, en campagne.

Nous faisons des partenariats avec pas mal de petites librairies qui sont d’excellentes animatrices en ligne alors qu’elles ne disposent souvent pas de budgets pour nous inviter, nous héberger ou payer notre déplacement.

·   Pour vous, que représente lecteurs.com de la Fondation Orange. En France mais aussi avec ce récent prix du livre en Afrique ?

Lecteurs.com, la Fondation Orange sont nos partenaires. Ils participent financièrement et bénéficient d’un certain nombre de rencontres qui permettent à pas mal de lecteurs de les connaître et inversement leurs abonnés nous découvrent. C’est un partenariat très harmonieux car nous sommes complémentaires.

 ·         Quand la situation redeviendra, disons, normale, Un endroit où aller va continuer à nous emmener par divers chemins livresques ?

Oui pour plusieurs raisons 

Ceux qui ne vont pas en librairie :

Les lecteurs ont été nombreux à saluer cette initiative de rencontres en ligne mais surtout nous avons eu de nombreux messages de lecteurs qui ne vont jamais en librairie assister à ces rencontres, soit parce qu’ils estiment qu’ils n’ont pas le temps, soit parce qu’ils sont handicapés, soit parce qu’ils ne feront pas cet effort pour un auteur qu’ils ne connaissent pas. Par ailleurs l’horaire est rarement le bon pour eux. Alors que voir une rencontre de la maison, pour celles et ceux qui ont des enfants, c’est possible.

De nombreuses personnes sont trop âgées pour aller en librairie mais regardent volontiers de chez elles car ils ont un accès à l’ordinateur assez quotidien.

Toutes ces personnes citées ont un pouvoir d’achat et sont des grands lecteurs.

Il y a également beaucoup plus de jeunes en ligne qu’en librairie

Une viralité unique des réseaux auteurs/éditeurs/libraires pour une même rencontre :

Beaucoup ont été ramenés par les réseaux des auteurs eux-mêmes qui ont beaucoup communiqué mais aussi par les réseaux des éditeurs et des libraires.

Beaucoup nous ont signalé les suivre chaque jour, même depuis le déconfinement, ou les voir en replays et ont mentionné également qu’ils avaient découvert des auteurs et acheté des livres. Voir quelques commentaires de lecteurs en fin de ce document…

Avec une seule rencontre nous fédérons non seulement des lecteurs de toute origine géographique mais nous pouvons aussi fédérer toutes les librairies qui communiquent autour des rencontres et en recueillent les fruits, ce qui intéresse les auteurs et les éditeurs.

Nous fabriquons des affiches à poser dans les librairies pour informer les lecteurs qui ne sont pas toutes encore averties de notre existence afin de démultiplier la communication. Certaines librairies font des tables Un endroit où aller avec les auteurs qu’elles désirent soutenir.

·     Envisagez-vous d’autres formes de rendez-vous, pas seulement des interviews d’écrivains mais, par exemple, des lectures à voix haute, un jeu façon questionnaire de Proust entre deux auteurs ?

Les lectures à voix haute existent déjà en extraits dans certaines de nos émissions mais la Maison de la Poésie fait cela très bien, d’où nos reprises parfois de leurs programmes. Quant au jeu, je n’ai pas trop envie de partir dans des choses anecdotiques qui nous éloignent de ce que nous faisons avec les auteurs. 

Quand on a écrit un livre et qu’on vient en parler et c’est déjà un exercice qui n’est pas forcément facile pour tous les auteurs. Nous préférons nous concentrer sur la façon dont on facilite cette prestation pour chaque auteur. Si on doit développer des aspects, ce sera plutôt en faveur d’un élargissement de l’offre des genres. De la BD, plus d’essais, des livres historiques, des livres de bien être… Des rencontres croisées entre auteurs de nationalités différentes. Et des soirées à thèmes.

·         Votre devise est ?

Dans la vie, il y a deux catégories d'individus : ceux qui regardent le monde tel qu'il est et se demandent pourquoi, et ceux qui imaginent le monde tel qu'il devrait être et qui se disent : pourquoi pas ? Georges Bernard Shaw


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