vendredi 1 mars 2019


Une noisette, un livre


 La chambre des coupables

Mathieu Delahousse





Voici un livre au cœur de l’actualité et qui aurait manqué s’il n’avait pas été écrit. Comment peut-on juger réellement le terrorisme ? Si le journaliste judiciaire n’apporte pas de réponse bien définie, il permet néanmoins d’éclairer le sujet en racontant le processus.
C’est une enquête effectuée de 2017 à 2019, sur les comparutions d’une quarantaine de djihadistes devant la 16° Chambre du Tribunal Correctionnel (avec le déménagement du TGI entre temps) de Paris et l’étude des dossiers. Pratiquement aucun des cas n’ont été médiatisés et l’auteur s’est attardé plus précisément sur une dizaine de prévenus.

Entre un prologue et un épilogue excessivement percutants, le lecteur a l’impression de s’installer dans la salle d’audience tant chaque détail est copieusement relaté, comme pour bien faire comprendre l’ambiance qui règne face à la lourdeur des faits. Sont relatés les échanges entre l’accusé et les magistrats, le rôle des avocats (pour la défense ô combien est souligné que leur rôle n’est pas accessoire mais primordial) et la mise en avant de cette si abstruse tâche que de devoir séparer le vrai du faux, le réel du dissimulé, de recouper toutes les auditions et les différentes enquêtes, preuves et pièces à conviction à l’appui.

Pris dans un étau de conscience, le journaliste a essayé de parler sans haine et de mettre uniquement l’accent sur le rôle de la justice, le tout dans une objectivité qui est, on peut le dire, un véritable tour de force. Car même si personne ne peut omettre la tragédie et toutes les vies brisées de par le monde face à l’hyper violence et à l’embrigadement sanguinaire, il est important de bien analyser les situations des uns et des autres, tenter de comprendre l’incompréhensible pour éviter une descente de Charybde en Scylla. Se prémunir de « l’intruse » c'est-à-dire de l’opinion publique, qui parfois tire trop la justice par la robe mais dont on ne peut, d’un autre côté, ne pas prendre en compte. Exercice d’équilibriste pour que les fils de vie des uns et des autres puissent, du moins pour certains, se rééquilibrer.

« Pour résister, je me raccrochais à la vieille Marianne qui veillait, posée sur un petit promontoire de la 16° chambre du vieux palais, face à l’horloge. Si son buste de plâtre blanc avait tenu jusque-là, il fallait croire qu’il ne tomberait pas cette fois ».

La chambre des coupables – Mathieu Delahousse – Editions Fayard – Janvier 2019

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