Souvenirs d'un médecin d'autrefois

lundi 3 février 2020


Une noisette, un livre


 Marche blanche

Claire Castillon




Quelque part en France, une petite fille a disparu. Kidnappée dans un parc quand elle jouait à cache-cache avec sa maman. Une partie de cache-cache à l’image du nouveau roman de Claire Castillon qui entraîne le lecteur dans un thriller psychologique sur les vertiges de l’amour délirant d’une mère.

La maman raconte, narre, explique. Plus rien ne sera comme avant. Dix ans que la petite Hortense a disparu, dix ans. Avec toujours un faible espoir de la retrouver. Carl, le papa, y croit encore et ne cesse d’imprimer des affiches et d’organiser des marches. Carl, le mari, le « gilet gris » source de mélancolie et de reproches de la part de son épouse.
Tout bascule à nouveau dans cet univers de cendres lorsque de nouveaux voisins emménagent ; un couple et deux adolescents, dont la fille Hélène… qui ressemble à Hortense. La maman est certaine que c’est elle. De déraison en déraison, c’est le parcours d’une maman qui aime à la folie. Jusqu’où ira-t-elle ? Car tout se devine progressivement…

Subtilement, l’auteure glisse tout ce qui entoure un couple lors d’un drame d’une disparition d’enfant, au sein même du foyer mais aussi à l’extérieur. Les gens qui vous regardent avec pitié, avec une crainte inexplicable comme si une contagion du malheur était possible, les marches qui au fil du temps perdent de leur intensité… et ceux qui vont tenter d’en profiter pour sortir un best-seller en manipulant l’histoire pour qu’elle soit populaire et lucrative.

J’avoue qu’à la réception de ce livre, j’ai hésité à le lire, le sujet étant terriblement anxiogène. Mais à la lecture des premières lignes j’ai su que l’écriture allait rendre la lecture envoûtante, captivante, saisissante. Claire Castillon manipule les mots comme un scientifique avec ses éprouvettes pour des réactions qui fusionnent immédiatement. Restent les inconnues : ces raisons qui s’égarent et dont ne sait d’où elles viennent, ces désorientations face au poids de la maternité et de la paternité, ces failles d’un couple qui doit continuer à se construire lorsque l’enfant arrive… La tristesse du récit aurait pu se convertir en une longue mélopée, c’est tout le contraire qui se produit. 

« Marche blanche » un roman qui pilote à travers les méandres de l’absence, des excès, de la vésanie. Sans jamais s’égarer.

« Les destins manquent de lumière pour fleurir, alors ils se fracassent ».

« Je n’épie pas, je promène mes yeux ».

« Je sens les choses. J’ai appris à les sentir, parce que je suis une mère-accordéon ».

Marche blanche – Claire Castillon – Editions Gallimard – Janvier 2020


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