Souvenirs d'un médecin d'autrefois

samedi 3 juillet 2021

 

Une noisette, un livre
 
Les Amazones
Jim Fergus

 


Dernier opus de la trilogie imaginée et écrite par l’écrivain franco-américain Jim Fergus, « Les Amazones » terminent l’incroyable épopée des « Milles femmes blanches » et « La vengeance des mères ».

Pour rappel, en 1874, le chef indien Little Wolf demande au président américain de troquer mille femmes blanches contre des bisons et des chevaux pour permettre une meilleure intégration du peuple indien. La proposition est acceptée et des femmes venant d’asiles ou de prisons sont envoyées auprès des Indiens. Là, elles sont mariées et découvrent la vie des Cheyennes en proie à la violence à la fois entre tribus et face à l’envahisseur blanc. Parmi ces femmes : May Dodd qui relate dans un journal les différentes étapes de cette aventure où les massacres des peuples autochtones la pousse à engager une lutte avec les Indiens contre la machine des cow-boys avec d’autres de ses collègues, elles deviennent, avec les vraies Indiennes, des Amazones comme au temps des Grecs.

En 2018, débarque dans le bureau du journaliste Jon W. Dodd, une indienne du nom de Molly Standing Bear qui est l’arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-petite fille de Molly et de Hawk, pour donner en partie les journaux perdus de Molly McGill et de May Dood, écrits dans la deuxième partie du dix-neuvième siècle. Elles relatent tour à tour leurs parcours, leurs combats, leurs errances, leurs amours au sein de cette communauté sachant dompter les éléments et vivre en parfaite communion avec la nature. Mais c’est l’époque où les Indiens sont chassés de leur territoire, les bisons exterminés et le peuple autochtone survivant n’a droit qu’à de maigres réserves.

Si l’écriture et la forme n’ont rien d’extraordinaire, le fond est saisissant et Jim Fergus termine crinière au vent – utiliser le terme panache eût été trop facile – sa trilogie que l’on pourrait qualifier de western réaménagé dans la réalité des faits historiques, ceux d’un pur génocide. Tout est savamment décortiqué, analysé et romancé substanciellement, authentiquement. Malgré l’abondance des personnages, jamais on ne s’égare dans le récit, au contraire, on fidélise chaque nom pour encore mieux suivre cette chevauchée de l’impossible et du courage. Merveilleux portraits de femmes, de femmes qui tentent de s’émanciper malgré la violence surgissant de toute part et dont les capacités de défense sont infinies. Beaucoup de féminisme dans cette série, ce féminisme qui place haut la femme sans pour autant rejeter l’autre partie qui forme les humains. Sans aucun doute, si les Indiens avaient pu rester maîtres de leur terre, la face du monde eût été changée…

« Se souciaient-ils, se rendaient-ils seulement compte que cette terre, divisée par l’Etat en parcelles de soixante-cinq hectares afin de les distribuer à des fermiers comme eux, ou de la vendre au prix de gros à de riches exploitants, avait pendant mille ans été le pays de populations indigènes dont les derniers représentants étaient aujourd’hui pourchassés, massacrés ou assignés à résidence, afin que les colons puissent en profiter ? »

Les Amazones – Jim Fergus – Traduction : Jean-Luc Piningre – Editions Pocket – Août 2020

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