Une noisette, un livre
Ceci n’est pas mon corps
Enguerrand Guépy
Juin 1987. Une nouvelle affaire criminelle éclate sur le sol français : un agent d’assurance tente de commettre le crime parfait pour une action philanthropique ! S’inspirant du film Assurance sur la mort de Billy Wilder, Yves Dandonneau met en scène un accident de la route avec un corps qui n’est pas le sien après avoir souscrit plusieurs contrats d’assurance vie en faveur de sa compagne. Seulement, les poulets finissent par découvrir le pot aux roses et le sieur Dandonneau devient le dindon, d’une farce macabre. L’écrivain et metteur en scène Enguerrand Guépy transforme cette histoire en un truculent roman avec un certain sieur Dindonneau…
Parce qu’évidemment, le souhait principal du criminel en herbe est de toucher l’argent des assurances vie. Mais trouver un pigeon à faire rôtir dans une voiture n’est pas une quête des plus faciles tout en prenant la précaution de bien se mettre en tête d’éviter tout apitoiement sur le sort de la future victime et de rejeter toute culpabilité. La chasse se prépare, les munitions s’affinent…
L’intérêt de ce roman noir n’est pas de connaître l’assassin puisque dès le départ le lecteur fait sa connaissance. Mais c’est de découvrir comment l’auteur a décortiqué tout le mécanisme qui pousse une personne ordinaire, sans scandale ni méfaits inscrits à son pedigree, à se convertir en meurtrier dans un processus machiavélique et arrivant à entraîner des personnes du même acabit sur le chemin de la criminalité.
Si la monotonie vous guette, ce roman est pour vous, endiablé jusqu’à la pointe de la plume. C’est drôle, cynique tout en dressant un portrait psychologique mijoté aux petits oignons – avec un dindonneau c’est forcément délicieux. Sous l’apparente légèreté, c’est une enquête minutieuse qu’a effectuée Enguerrand Guépy pour remonter le fil de l’histoire, des origines jusqu’au dénouement entre menottes et képis, des détails anodins et pourtant véridiques ; c’est lorsque tout semble absurde et de la pure imagination que se révèle l’implacable vérité et véracité.
Après avoir fait la connaissance avec Enguerrand Guépy par son ouvrage sur Patrick Dewaere « Un fauve » - acheté pour le titre et le nom de l’acteur – votre serviteur peut confirmer, la patte sur la noisette, de la capacité de l’écrivain à raconter une histoire vraie dans une forme romancée originale, captivante oscillant entre un charme pittoresque et un regard perçant.
« Il n’avait quasiment aucune chance que Dindonneau le trouvât sympathique tant il détestait la geignardise, lui seul ayant le droit de vociférer contre les quatre éléments ».
« Dans le destin des criminels, il faudrait mesurer l’impact des libations ».
« Devant son miroir, Dindonneau est un prêcheur inspiré. Brosses à dents, peignes, savon et shampooing l’écoutent, extatiques. Ainsi doivent être les grands révolutionnaires et les créateurs de schismes, porteurs d’une flamme inaltérable capable de convaincre les cotons-tiges ».
Ceci n’est pas mon corps – Enguerrand Guépy – Editions du Rocher – Mars 2021
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