Souvenirs d'un médecin d'autrefois

vendredi 4 novembre 2022

 

Une noisette, un livre
 
« J’ai été fusillée, ma chérie… »
Christine Bernard

 


Voilà un livre pas comme les autres. Pas seulement pour le témoignage mais pour la façon dont il est transmis. Tout en douceur, tout en amour. En opposition totale avec ce qu’ont vécu la mère et les aïeuls de l’autrice.

« J’ai été fusillée, ma chérie » est la réponse de la mère de Christine Bernard lorsque celle-ci a 12 ans. Elle s’étonne que sa mère ne croque jamais une pomme ou un sandwich, ni même un carré de chocolat. Elle l’observe et constate que pour manger elle glisse discrètement la fourchette entre ses lèvres parce qu’elle ouvre à peine la bouche. Pourquoi ? Parce qu’à 15 ans, dans la cave d’un immeuble de Varsovie, le 7 août 1944, Yolande Ebin est devant un peloton d’exécution nazi aux côtés de huit autres résistants. Tous tombent. Yolande se croit morte, la balle est sortie par la bouche. Tragique et miraculeux.

Depuis cette réponse et la connaissance de la fusillade, la vie de Christine Bernard va changer. Déjà passionnée par les livres, elle veut tout savoir et progressivement va découvrir la tragédie familiale : une grand-mère fusillée, un oncle déporté vers les camps de la mort, un grand-père qui s’est porté volontaire pour aller soigner dans le ghetto de Varsovie et a résisté à tout. Autre surprise : il était juif.

Des photos accompagnent ce témoignage narré avec une sensibilité extrême, une finesse qui émeut au possible et un phrasé aussi subtil que bouleversant. S’appuyant sur les écrits de sa mère (ô combien ça a claqué en lisant que la mère pensait ne plus avoir de nez, écho énorme, résonnance familiale) Christine Bernard livre une histoire intime dans une histoire européenne à ne jamais oublier. Pour la liberté de tous et en hommage à ceux qui sont tombés ou ont failli tomber.

La postface de Jean-Yves Potel ajoute des éléments historiques à ces destins polonais face aux machines de la mort.

« J’ai été fusillée, ma chérie… » - Christine Bernard – Préface d’Anette Wieviorka – Postface de Jean-Yves Potel – Éditions Mille Sources – Mai 2021

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