Une noisette, un regard, un tableau
El Grito N°7
Antonio Saura
Le Musée Picasso, rue de Thorigny à Paris,
offre une exposition exceptionnelle sur l’une des toiles les plus célèbres du
XX° siècle, ou plutôt tristement célèbre puisqu’elle représente le massacre de
Guernica survenu le 26 avril 1937. Quelques mois plus tard, Pablo Picasso réalise
une fresque monumentale pour l’Exposition Universelle de Paris à la demande du
gouvernement républicain. Elle devient aussitôt un symbole de résistance. Mais
pas que. Comme l’a souligné le peintre « la peinture n’est pas faite pour
décorer les appartements. C’est un instrument de guerre offensive et défensive
contre l’ennemi ».
L’art est un perpétuel renouveau et une
perpétuelle vision sur le passé pour mieux décrypter le présent. Ainsi, si
Picasso s’est inspiré probablement du « Tres de mayo » de Francisco
Goya suite à l’assassinat des combattants espagnols par l’armée napoléonienne,
Picasso a été ensuite l’un des mentors de nombreux artistes pour continuer à
sensibiliser l’opinion sur l’absurdité des guerres, ces guerres qui n’ont
jamais cessé depuis la nuit des temps.
Parmi les successeurs du Malagueño, l’un de
ses compatriotes espagnols : Antonio Saura. Et, est exposée l’une de ses
plus expressives œuvres : El Grito, réalisée en 1959. Son inspiration
vient à la fois du « Christ crucifié » de Diego Velasquez, de Picasso
évidemment mais aussi et peut-être surtout d’une photo. Celle de Robert Capa où
il capte en direct la mort d’un républicain espagnol en 1936. Etourdissant.
La toile d’Antonio Saura ne peut échapper
du regard. Un regard qui se prolonge, qui scrute, qui cherche à comprendre.
Visuellement c’est d’une esthétique déconcertante, tant de précisions, de reflets
pour exprimer la laideur de l’humanité. Un tableau d’une violence extrême,
comme si le cri de homme sortait du cadre, cherchait presque à vous entraîner
dans l’enfer de la mort. Comme pour Guernica, aucun effet colorimétrique, juste
du noir et blanc. Brut, net, précis. Le surréalisme à son climax pour peindre
le réalisme.
Exposition Guernica – Musée
Picasso – Jusqu’au 29 juillet 2018
Mort d'un républicain espagnol, Federico Borell Garcia. ©Robert Capa |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire