Souvenirs d'un médecin d'autrefois

dimanche 17 juin 2018


Une noisette, un regard, un tableau

 

El Grito N°7

Antonio Saura


 

 

Le Musée Picasso, rue de Thorigny à Paris, offre une exposition exceptionnelle sur l’une des toiles les plus célèbres du XX° siècle, ou plutôt tristement célèbre puisqu’elle représente le massacre de Guernica survenu le 26 avril 1937. Quelques mois plus tard, Pablo Picasso réalise une fresque monumentale pour l’Exposition Universelle de Paris à la demande du gouvernement républicain. Elle devient aussitôt un symbole de résistance. Mais pas que. Comme l’a souligné le peintre « la peinture n’est pas faite pour décorer les appartements. C’est un instrument de guerre offensive et défensive contre l’ennemi ».

L’art est un perpétuel renouveau et une perpétuelle vision sur le passé pour mieux décrypter le présent. Ainsi, si Picasso s’est inspiré probablement du « Tres de mayo » de Francisco Goya suite à l’assassinat des combattants espagnols par l’armée napoléonienne, Picasso a été ensuite l’un des mentors de nombreux artistes pour continuer à sensibiliser l’opinion sur l’absurdité des guerres, ces guerres qui n’ont jamais cessé depuis la nuit des temps.

Parmi les successeurs du Malagueño, l’un de ses compatriotes espagnols : Antonio Saura. Et, est exposée l’une de ses plus expressives œuvres : El Grito, réalisée en 1959. Son inspiration vient à la fois du « Christ crucifié » de Diego Velasquez, de Picasso évidemment mais aussi et peut-être surtout d’une photo. Celle de Robert Capa où il capte en direct la mort d’un républicain espagnol en 1936. Etourdissant.

La toile d’Antonio Saura ne peut échapper du regard. Un regard qui se prolonge, qui scrute, qui cherche à comprendre. Visuellement c’est d’une esthétique déconcertante, tant de précisions, de reflets pour exprimer la laideur de l’humanité. Un tableau d’une violence extrême, comme si le cri de homme sortait du cadre, cherchait presque à vous entraîner dans l’enfer de la mort. Comme pour Guernica, aucun effet colorimétrique, juste du noir et blanc. Brut, net, précis. Le surréalisme à son climax pour peindre le réalisme.

Exposition Guernica – Musée Picasso – Jusqu’au 29 juillet 2018
 
Mort d'un républicain espagnol, Federico Borell Garcia. ©Robert Capa
 

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