Souvenirs d'un médecin d'autrefois

jeudi 22 octobre 2020

 

Une noisette, un livre
 
Urgence ! Il faut sauver les montagnes
Reinhold Messner

 


Nul besoin, ou presque, de présenter Reinhold Messner, celui qui a, pour la première fois, franchi l’Everest sans aucun apport d’oxygène, et qui a toujours pratiquer d’une manière responsable en faisant corps avec les éléments.

Amoureux de la nature dans toute la noblesse et l’authenticité du terme, il a aussi bien tutoyé les sommets que tracer ses pas dans les déserts et autres lieux extrêmes. Député écologique pendant cinq ans, il se consacre également à l’écriture et depuis 2003 a créé les « Messner Mountain Museums » pour interpeller sur la nécessité de prendre soin de ce qui fait l’histoire de la nature, de la montagne et de ses peuples.

Nul besoin également de présenter l’état de notre planète en général et celui de la montagne en particulier. La technologie permet d’améliorer nos conditions de vie et le tourisme d’offrir des journées inoubliables pour des millions de personnes. Seulement, la facture est lourde sur le registre de l’environnement : si d’un côté l’amélioration du niveau de vie est notoire, d’un autre côté les conditions climatiques sont l’un des facteurs de l’augmentation de la pauvreté dans certaines zones du monde et de milliers de déplacés.

Si nous restons dans l’univers de prédilection du célèbre alpiniste, pas besoin de longs discours, des images suffisent. La fonte des glaciers et un exemple qui doit tenir particulièrement au cœur de Messner, le pilier qui porte le nom de feu son ami Bonatti : en 2015, il « s’effondre de tout son long » pour reprendre l’expression utilisé par Thomas Vennin, à cause du réchauffement climatique (une enquête a été menée) qui entraîne la dégradation du pergélisol (permafrost).

Cet appel de Reinhold Messner n’est pas une simple tribune accusatrice contre nos modes de vie, il est simplement une énième tentative pour prendre conscience que nous sommes tous issus de la même mère planète et qu’il faut la protéger comme nous le pouvons, selon nos possibilités, nous avons tous notre part de colibri, en « adoptant une attitude minimaliste face au développement des zones sauvages ». Sans faire l’apologie du monde d’avant il serait salutaire de savoir se contenter du confort sans aller aux gadgets inutiles, aux équipements dernier cri, à ne pas jeter ses déchets sur le sol et dans le vide, à ne pas se glorifier d’avoir pris de la hauteur par un ensemble de remontées mécaniques ou par hélicoptère, etc. L’engouement des sports de montagne est appréciable mais parfois c’est tout de même un sentiment d’effroi qui surgit, telle cette photo prise en mai 2019, par le jeune grimpeur Rizza Alee,  de cette colonie humaine  (une « death race ») sur les arêtes de l’Everest où bientôt d’aucuns songent à mettre en place des tickets d’attente et où certains grimpeurs poussaient ceux qui n’allaient pas assez vite ! L’esprit de la montagne, comme le souligne justement l’alpiniste germano-italien, ce n’est pas un exploit à rechercher, un selfie de quelques secondes, un orgueil de citadin, c’est un lieu à respecter et à franchir au prix du courage, de la sueur, d’efforts en observant son univers aussi bien pour sa propre survie que pour celle de ces rocs intrépides.

Un manuel de survie à lire, à partager pour que cette immensité de l’univers continue d’être un lieu de ressourcement, de beauté, pour le plus grand plaisir de la flore, de la faune et des Homo Sapiens sachant fouler les sols sans un défoulement vertigineux.


Pour compléter cet ouvrage, j’invite mes fidèles lecteurs à visiter la page web de ACTS, Action Collective de Transition pour nos Sommets, une association récemment crée par un collectif d’alpinistes engagés https://www.acts-association.org/

« La montagne est indissolublement liée à l’histoire de la Terre et à celle de l’humanité. Que ce soit au Tibet, à Bali, au Japon, en Equateur ou chez les Indiens Hopis, de nombreux rites ont ces mythes pour origine : les montagnes sont la demeure des dieux ou l’axe de la Terre, autour duquel tout se meut ».

« Les bons sentiments ne suffiront pas à sauver le paysage naturel ni à éviter l’effondrement de l’agriculture de montagne. Je demande donc aux alpinistes d’endosser le rôle de pionniers, comme à l’époque de l’ouverture des Alpes au tourisme, mais dans le sens inverse, cette fois-ci. C’est à nous d’assumer la responsabilité de la protection de la montagne. Personne ne souhaite un retour au passé. Mais il faut absolument reconsidérer notre frénésie de mobilité. La construction de routes et de remontées mécaniques supplémentaires est-elle vraiment nécessaire en montagne, quand on sait qu’elles sont la cause principale des dommages environnementaux en dehors des zones urbanisées ? Il ne s’agit pas seulement de la survie de nombreuses espèces animales et végétales, mais aussi de la sauvegarde de valeurs comme la grandeur, le silence, l’harmonie et le danger, sans lesquelles la montagne perdra à nos yeux tout intérêt ».

« Nous n’avons pas de nature de rechange ».

Urgence ! Il faut sauver les montagnes – Reinhold Messner – Traduction : Catherine Schiellein – Editions Glénat – Septembre 2020

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