Souvenirs d'un médecin d'autrefois

dimanche 17 décembre 2017


Une noisette, un livre

 

La Disparition de Josef Mengele

Olivier Guez


 


Auschwitz. Pandemonium réel de l’horreur dans toute sa monstruosité. La Shoah, la solution finale, ce fut des assassinats par milliers, par millions, des tortures et… des expériences médicales par les « docteurs de la mort », oxymore total et absurde. Pourtant ces médecins ont existé et combien d’entre eux ont échappé à la justice, n’ont jamais été condamné pour des crimes inqualifiables. On pense de suite à Aribert Heim et Josef Mengele. C’est ce dernier qui est le sujet du dernier roman d’Olivier Guez « La Disparition ».

Le récit débute en 1949 quand « l’ange de la mort » débarque en Argentine, nation d’un continent qui va devenir une terre d’accueil (ou plutôt de cachette) pour un chiffre incalculable de nazis. Et si, par exemple, Klaus Barbie a fini par être rattrapé par la justice, beaucoup couleront des jours tranquilles (ou presque), tel Josef Mengele qui s’éteindra sur les côtes brésiliennes en 1979. 30 ans de liberté totale…

La forme du roman permet de donner une dimension excessivement puissante à cette tragédie de l’impunité et du caractère absolument déconcertant de Josef Mengele qui ne « s’abandonnait jamais à un sentiment humain » !

Egoïste, narcissique, insensible pour les autres, paranoïaque… la liste des qualificatifs envers ce bourreau est longue ; la seule consolation est de se rendre compte qu’il n’a jamais été vraiment  heureux  dans cette fuite, il se sentait traqué et paniquait à chaque instant… lui qui jouissait de dominer les déportés, qui riait du sort funeste de milliers de juifs, qui faisait régner la terreur était, en fait, un piètre couard, incapable de prendre seul une décision et sans l’aide de sa riche famille et d’amis plus solidaires que lui, il aurait terminé beaucoup plus rapidement dans les ténèbres de la mort lente…

Récit qui permet de sombres réflexions sur la responsabilité de ceux qui aident des criminels de masse à s’enfuir, à ces dictatures qui se soutiennent les unes aux autres même si, parfois, les buts et idéaux politiques sont différents, à cette tendance à protéger ou à oublier parce que d‘autres enjeux sont à affronter. Et puis cette notion de culture, d’éducation, qui est loin d’être une arme infaillible contre l’intolérance et l’extrémisme : nombre de nazis étaient des amoureux de la littérature et de musique, Mengele sifflant de notes de « Tosca » en acheminant les déportés vers les chambres à gaz… el lucevan senza stelle…

Un ouvrage à lire, relire parce que l’histoire ne doit jamais être effacée.  A l’éblouissement du style et de l’écriture d’Olivier Guez, se côtoie la noirceur désarmante sur cette scélératesse dont est capable certains êtres dénommés humains. Et ce, sans avoir l’once d’un regret et pensant sincèrement qu’ils agissent pour le bien de l’humanité…

La disparition de Josef Mengele – Olivier Guez – Editions Grasset – Octobre 2017

Livre reçu grâce aux Editions Grasset et la communauté Orange Lecteurs

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