Une noisette, un livre
Même Dieu ne veut pas
s’en mêler
Annick Kayitesi-Jozan
Il
y a des livres qu’on ne peut définir, des livres où la moindre critique serait
absurde face à la puissance d’un témoignage déchirant. Dans « Même Dieu ne
veut pas s’en mêler » ce ne sont pas que des mots qui sont inscrits sur
les pages mais aussi des larmes de sang, elles coulent dans un fleuve de
détresse, dans une brûlure de l’âme indéfinissable. On se sent comme en
apesanteur, détaché, blessé dans ses yeux et on ne peut imaginer le degré de
désolation qu’a vécu un peuple dans ces années de géhenne.
Annick
Kaytesi-Kozan a survécu au génocide des Tutsis au Rwanda. Elle-même n’aime pas
ce mot, car il englobe de trop, ne définit pas assez le supplice vécu par des
milliers et des milliers de personnes.
Réfugiée
en France quelques années après avoir perdu tous ses proches, excepté sa sœur
Aline qui a miraculeusement survécue à ses blessures indescriptibles, Annick
Kaytesi-Kozan est mariée et mère de deux enfants. Elle pourrait aspirer au
bonheur mais il est sans cesse endeuillé avec ces fantômes des massacres qui la
hantent et avec l’éternel regret de ne savoir où sont les corps, de ne pouvoir
offrir une sépulture digne à sa maman. Quant à ses enfants ils n’auront jamais
la joie de connaître leur grand-mère (ni leur grand-père décédé dans un
incendie lors d’un séjour en Belgique) et pourtant, ils en posent des
questions… comment leur répondre, que leur dire…
Rendre
compte par l’écrit est peut-être une façon non seulement de perpétuer la mémoire
de la dévastation d’une population, mais aussi, une manière de se libérer un
peu d’un carcan insoutenable.
Seule
note d’espérance est la manière poétique de l’auteure pour expliquer à ses
enfants le chemin de vie, comme un collier où chaque geste de tendresse est une
perle qui s’ajoute au cordon, c’est « le
souffle de la vie ». Les maux peuvent s’atténuer lorsque les mots
respirent…
Même Dieu ne veut pas
s’en mêler – Annick Kaytesi-Jozan -
Editions Seuil – Septembre 2017
Livre
reçu dans le cadre du Grand Prix des Lectrices Elle
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