Une noisette, un livre
Cent millions d’années
et un jour
Jean-Baptiste Andrea
Quand
un arthropode marin, disparu il y a plus de deux cent cinquante millions
d’années, un trilobite exactement, est la base d’un roman d’aventures et
d’extrême, on se dit que ce nouveau roman de Jean-Baptiste Andrea mériterait
d’être dans des centaines d’années fossilisé sur une pente des Alpes pour qu’un
enfant le trouve et lui donne l’envie de devenir un paléontologue aux jambes
d’alpiniste.
Stan,
paléontologue confirmé ne cesse de courir après des rêves voire des chimères. Dernier
projet en date en cette année 1954 ? Celui de retrouver un squelette,
genre brontosaure qu’aurait aperçu entre France et Italie son concierge et qui
a été comparé à un monstre par une petite fille ayant entendu un brin de
l’histoire. Et, si enfin Stan accédait à cette quête du Graal, ce squelette tel
un objet sacré pour une gloire éternelle, l’effort ultime pour un voyage
initiatique, celui d’une ascension de soi-même sur les pentes vertigineuse du
plus haut massif européen. Convaincant, il embarque son fidèle ami et ancien
élève Umberto et un jeune scientifique Peter, ce dernier cachant un mystérieux
personnage dans son sac à dos. S’ajoute un autre mousquetaire, le guide de
montagne Gio, énigmatique et indispensable.
Au
fur et à mesure de la progression de l’ascension, Stan ne cesse de poser des
pitons de son enfance en songeant à sa mère disparue trop tôt, à son père qui
ne touchait ses proches que pour cogner, à son chien Pépin, à ses Pyrénées natales ;
il met en cordée ses quelques joies et ses nombreuses peines, à la fois pour
s’accrocher mais pour aussi se libérer d’une camisole étouffante.
Mais
arrivera-t-il avec ses camarades à percer la glace pour rencontrer cet étrange
monstre des neiges ? Que referment dans leur ventre ces glaciers aussi
mouvants que des sables ?
L’écrivain
signe un roman haletant où se mêlent avalanches cérébrales, dépassement de soi
et vertiges des sommets. Mais où domine la nature, la nature dans sa beauté,
dans sa grandeur, dans ses merveilles mais aussi dans toute sa tragédie et sa
dangerosité.
On
s’attache à cette aventure comme si le livre était devenu un baudrier car il
renferme à la fois magie et réalité, évasion et réflexion sur des pentes et des
crêtes qui deviennent progressivement le terrain d’une poésie de la liberté et
du dénuement.
Stan,
un paléontologue au pied grec qui tel un aède nous offre une mythologie de la
montagne et de ses glaciers.
« Partir, c’est
déjà réussir »
« Qui a dit que les
montagnes n’ont pas de sentiments, elles qui rougissent au lever du
soleil ? »
« La beauté était
devant moi, sur les ubacs et les adrets. Le cirque entier s’était paré de
centaines et de centaines de rubans d’argent jetés sur ses crêtes, disposés sur
ses pentes, une fête de village à l’échelle d’un paysage ».
« Moi ce que
j’aime, c’est le vivant. Même s’il est mort depuis cent millions
d’années ».
« Appelez-moi
neige : je ne suis plus rien d’autre. Elle est partout. Sur les montagnes
et dans les creux, en équilibre sur les crêtes. Dans mon col, dans mes
chaussures, dans mes gants. Dans mes poumons, dans ma bouche et dans mes yeux.
Sur mes cils, dans ma barbe, dans ma tente. Je ne suis que neige ».
Cent millions d’années
et un jour – Jean-Baptiste Andrea – Editions L’iconoclaste – Août 2019
Avec
mes remerciements noisettés à Babelio pour l’envoi de ce livre
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