mardi 27 août 2019


Une noisette, un livre


 Cent millions d’années et un jour

Jean-Baptiste Andrea




Quand un arthropode marin, disparu il y a plus de deux cent cinquante millions d’années, un trilobite exactement, est la base d’un roman d’aventures et d’extrême, on se dit que ce nouveau roman de Jean-Baptiste Andrea mériterait d’être dans des centaines d’années fossilisé sur une pente des Alpes pour qu’un enfant le trouve et lui donne l’envie de devenir un paléontologue aux jambes d’alpiniste.

Stan, paléontologue confirmé ne cesse de courir après des rêves voire des chimères. Dernier projet en date en cette année 1954 ? Celui de retrouver un squelette, genre brontosaure qu’aurait aperçu entre France et Italie son concierge et qui a été comparé à un monstre par une petite fille ayant entendu un brin de l’histoire. Et, si enfin Stan accédait à cette quête du Graal, ce squelette tel un objet sacré pour une gloire éternelle, l’effort ultime pour un voyage initiatique, celui d’une ascension de soi-même sur les pentes vertigineuse du plus haut massif européen. Convaincant, il embarque son fidèle ami et ancien élève Umberto et un jeune scientifique Peter, ce dernier cachant un mystérieux personnage dans son sac à dos. S’ajoute un autre mousquetaire, le guide de montagne Gio, énigmatique et indispensable.

Au fur et à mesure de la progression de l’ascension, Stan ne cesse de poser des pitons de son enfance en songeant à sa mère disparue trop tôt, à son père qui ne touchait ses proches que pour cogner, à son chien Pépin, à ses Pyrénées natales ; il met en cordée ses quelques joies et ses nombreuses peines, à la fois pour s’accrocher mais pour aussi se libérer d’une camisole étouffante.

Mais arrivera-t-il avec ses camarades à percer la glace pour rencontrer cet étrange monstre des neiges ? Que referment dans leur ventre ces glaciers aussi mouvants que des sables ?

L’écrivain signe un roman haletant où se mêlent avalanches cérébrales, dépassement de soi et vertiges des sommets. Mais où domine la nature, la nature dans sa beauté, dans sa grandeur, dans ses merveilles mais aussi dans toute sa tragédie et sa dangerosité.
On s’attache à cette aventure comme si le livre était devenu un baudrier car il renferme à la fois magie et réalité, évasion et réflexion sur des pentes et des crêtes qui deviennent progressivement le terrain d’une poésie de la liberté et du dénuement.

Stan, un paléontologue au pied grec qui tel un aède nous offre une mythologie de la montagne et de ses glaciers.

« Partir, c’est déjà réussir »

« Qui a dit que les montagnes n’ont pas de sentiments, elles qui rougissent au lever du soleil ? »

« La beauté était devant moi, sur les ubacs et les adrets. Le cirque entier s’était paré de centaines et de centaines de rubans d’argent jetés sur ses crêtes, disposés sur ses pentes, une fête de village à l’échelle d’un paysage ».

« Moi ce que j’aime, c’est le vivant. Même s’il est mort depuis cent millions d’années ».

« Appelez-moi neige : je ne suis plus rien d’autre. Elle est partout. Sur les montagnes et dans les creux, en équilibre sur les crêtes. Dans mon col, dans mes chaussures, dans mes gants. Dans mes poumons, dans ma bouche et dans mes yeux. Sur mes cils, dans ma barbe, dans ma tente. Je ne suis que neige ».

Cent millions d’années et un jour – Jean-Baptiste Andrea – Editions L’iconoclaste – Août 2019

Avec mes remerciements noisettés à Babelio pour l’envoi de ce livre

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