Noisette
de mémoire
Jacaranda
Gaël
Faye
Dés les
premières pages, le lecteur sait qu’il entre dans un domaine qui ne va pas le
laisser indifférent, où les lueurs vont tenter de percer à travers les ténèbres
sous la canopée des horreurs humaines. Des branches livresques se posent sur
vous par la maîtrise des métaphores tirant les racines du mal. Jacaranda, est
bien plus qu’un arbre à palabres. Il est le témoignage vivant, à travers le
personnage de Milan qui part au Rwanda pour connaître les origines de sa mère
cachées sous un silence permanent, d’un génocide né dans l’histoire déchirée du
Rwanda.
Élève médiocre, Milan est un enfant qui voudrait mieux connaître ses parents, surtout sa mère, originaire de Rwanda mais qui refuse toute réponse à ses questions. L’arrivée de Claude pendant quelques mois va interpeller Milan. Claude a le même âge que lui, ne parle pas, est d’une maigreur affligeante et un énorme trou s’est formé dans sa tête. Il le considère comme le frère qu’il n’a pas et l’entoure d’une immense affection. À sa grande surprise, sa mère part au Rwanda mais reviendra sans Claude. Un déchirement. Révolté en lui-même, des années plus tard il se consacre à une recherche sur le génocide rwandais et part vivre à Kigali dans le quartier de Nyamirambo. Il retrouvera Claude, des personnages iconoclastes et verra Stella grandir, cette petite fille qui se réfugie sans cesse dans son jacaranda. Mais pourquoi sa mère persiste à se dérober...
Si la poésie est toujours la marque de fabrique de Gaël Faye, l’auteur est également maître dans la narration, sachant mieux que quiconque expliquer le drame du Rwanda conduisant au génocide des Tutsi. Malgré le crépuscule qui s’est abattu, malgré les horreurs perpétrées, le pays se reconstruit en essayant de pardonner, sans oublier pour autant. Porter la voix des disparus et continuer à espérer à une humanité. Jacaranda est tout à la fois. Poignant, fort et, paradoxalement, terriblement vivant : « J’avais envie de m’enfuir, de quitter cette terre de mort et de désolation (…) puis je pensais aussitôt à Claude, à Eusébie, à Stella, et quelque chose se fissurait en moi qui laissait passer un soleil insensé, la possibilité, malgré tout, de la vie et de la beauté ».
Jacaranda – Gaël Faye – Éditions Grasset – Août 2024
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire