Souvenirs d'un médecin d'autrefois

mardi 28 octobre 2025

 

Noisette déterminée

Et refleurir

Kiyémis

 


L’histoire débute en 1954 dans la campagne camerounaise pour se terminer de nos jours en France. Andoun n’est pas comme les autres. Comme le répète son père « Tu es spéciale ma fille ». Une jeune fille, belle et rebelle. Qui dit non. Non, aux travaux des champs, non au mariage arrangé, non aux diktats familiaux, non à la fatalité. Elle espère parce qu’elle a des rêves fleuris. Ces fleurs imaginaires deviendront réalité même si le parcours risque d’être semé d’embuches.

Au court de l'histoire, elle part à Douala chez son frère pour tenter d’aller à l’école. En vain. Mais, voulant évoluer dans un autre milieu que le sien, elle fréquente une amie d’un quartier bourgeois de Douala et lors d’une soirée se laisse séduire par un militaire camerounais. De cette relation d’un soir naîtra une fille qui va devenir sa force, sa motivation.

Ce récit féministe, qui évite la victimisation, met en avant une héroïne forte et inspirante. Et refleurir est le premier roman de Kiyemis que l’on peut saluer pour la qualité de son écriture, son rythme, ses dialogues et la profondeur de ses personnages.

Kiyemis offre un portrait vibrant d'une femme africaine qui brise les chaînes du déterminisme social et familial pour tracer sa propre voie. Andoun est décidée à se forger un destin à son image, malgré les obstacles et les conventions. Un hymne à la liberté et à l'espoir.

 Et refleurir – Kiyémis – Éditions Pocket - Février 2025

 

 

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Noisette sombre sous le Roi-Soleil

Légitime violence

                                             Marc Dugain

 

 


Marc Dugain nous plonge dans les bas-fonds du Grand Siècle avec L'Affaire des poisons. Louis XIV, figure tutélaire mais étonnamment en retrait, laisse la scène à des personnages troubles et fascinants ; Colbert, La Reynie, Sainte-Croix, La Chaussée, Briancourt, Reich de Pennautier, évidemment la marquise de Brinvilliers, et, l’espionne plus ou moins fictive Leonor de Warnens, tous acteurs d'une tragédie qui a marqué l'Histoire de France.

Dugain, loin de se contenter d'une simple reconstitution historique, injecte à son récit un souffle romanesque indéniable. Le style est vif, incisif, et la narration se révèle étonnamment moderne. On est happé par les intrigues, les manipulations, et les secrets qui entourent l'Affaire des poisons.

La marquise de Brinvilliers : bourreau ou victime ?

L'un des atouts majeurs du roman réside dans le portrait nuancé qu'il dresse de la marquise de Brinvilliers. Loin de la simple image de monstre froid et calculateur, Dugain explore les failles et les contradictions d'une femme prise au piège d'une société patriarcale. La condition féminine au XVIIe siècle est ainsi mise en lumière, révélant les injustices et les oppressions subies par les femmes de l'époque.

Le roman pose une question fondamentale : quelle est la responsabilité réelle de la marquise dans l'affaire des poisons ? A-t-elle agi de son propre chef, ou a-t-elle été manipulée, voire contrainte, par des forces qui la dépassent ? Dugain laisse planer le doute, invitant le lecteur à se faire sa propre opinion.

Au-delà du simple récit d'un scandale, L'Affaire des Poisons offre une lecture critique du Grand Siècle. Dugain dépeint une société gangrenée par les intrigues, la corruption, et les luttes de pouvoir. La cour de Louis XIV, loin de l'image d'Épinal, apparaît comme un lieu de tous les dangers, où la vie ne tient qu'à un fil.

Légitime violence est bien plus qu'un simple roman historique. C'est une plongée captivante dans les zones d'ombre du Grand Siècle, un récit haletant porté par des personnages complexes et ambivalents, et une réflexion sur la condition humaine. Un livre à lire absolument pour tous ceux qui s'intéressent à l'Histoire et aux mystères de l'âme humaine.

« Leonor de Warnens avait pour les hommes la méfiance du chat pour les chiens ».

Légitime violence – Marc Dugain – Éditions Albin Michel – Octobre 2025

jeudi 23 octobre 2025

 

Noisette onirique

Colza

Guillaume Ledoux

 

 


Ce premier roman de Guillaume Ledoux est une invitation à arpenter un champ livresque, une étendue fertile où les mots et les phrases semblent jaillir de sous terre.  L'œuvre dépeint un univers où les rêves d'écriture se mêlent à la réalité brute d'une région qui évoque probablement le Berry, notamment par la référence aux fresques de Jorge Carrasco.

On découvre un jeune homme écorché vif, entouré de personnages qui le sont tout autant, qui nourrit l'ambition de devenir écrivain.  Hanté par le doute, conséquence d'un parcours semé d'embûches, il voit sa vie basculer lors de sa rencontre avec Olivia, une étudiante issue d'un milieu différent du sien. Leur amour passionné conduit Olivia à devenir le coach en écriture de son amant. Cependant, l'avenir de leur relation demeure incertain… quelle sera l’issue de leur histoire ?

Colza se révèle être un véritable délice, un portrait sensible d'un être atypique qui sème des graines de beauté sur la partition sombre du temps qui passe.

L'écriture de Guillaume Ledoux, magnifique et riche en métaphores, transcende le simple récit. Elle permet à l'auteur de communier avec le lecteur, transformant sa plume en un pinceau vibrant qui donne vie à l'aventure. L'auteur imagine le fruit de ses écrits et insère entre les chapitres de savoureuses nouvelles, dont une en hommage aux bouquinistes des bords de Seine. Un livre à inscrire sur la liste de vos envies pour vous transporter dans un univers à la fois réaliste et onirique.

« Mon ami, pensez-vous que l’on puisse aimer quelqu’un au travers d’une autre âme ? »

« Elle s’allongea entièrement, posa sa tête sur mes genoux, et j’embrassai ses yeux pour qu’ils soient indulgents lorsqu’ils liraient la suite. »

« Tout était élégant chez elle, ses gestes, sa façon de se déplacer, de s’habiller et même lorsqu’elle était nue, j’avais l’impression qu’elle portait la plus belle robe du monde. »

« On ne peut pas commander aux éléments, mais on peut choisir de se laisser remuer par eux, de se mettre à l’abri ou d’aimer les intempéries, laisser la pluie nourrir la terre et soleil fleurir les champs. »

Colza – Guillaume Ledoux – Éditions Le Cherche Midi – Mai 2025

 

 

vendredi 22 août 2025

 

Noisette d’invitation à la valse

Je vous dédie mon silence

Mario Vargas Llosa

 


 

Un livre posthume pour sa traduction française avec un titre si annonciateur… Qui, pourtant, ne fait que reprendre un passage du livre.

Un livre mi-roman mi-document rendant hommage à la musique péruvienne et plus particulièrement à sa valse créole. Le monde entier connaît la version de « La foule » chantée par Edith Piaf. Son titre d’origine est « Que Nadie sepa mi Sufrir » créée en 1936 par deux musiciens argentins Enrique Dizeo et Ángel Cabral, dans le pur style de valse criolla peruana. Cette musique est née au début du XIXe siècle dans des quartiers populaires pour franchir ensuite d’autres publics. Cette valse a une longue histoire, issue des métissages et de l’évolution du pays andin.

L'histoire que nous raconte Mario Vargas Llosa a forme d’écriture qui renoue avec ses premières années d’écrivain. Sa plume glisse sous les traits d’un musicologue ; Toño Azpilcueta, non reconnu qui rêve d’obtenir une chaire sur la musique péruvienne à l’université. Ivre d’utopie, tourmenté par des cauchemars diurnes et nocturnes dans lesquels il se croit attaqué par une armée de rats, il rencontre par hasard un guitariste d’exception : Lalo Molfino. Bouleversé, il part à sa rencontre. Hélas, la mort sape la vie de ce jeune prodige. Convaincu qu’il tient là un récit à mettre en lumière, Toño s’engage à écrire un livre sur ce musicien et sur la musique péruvienne en démontrant que cette musique créole peut rassembler le pays et les peuples.

Si vous aimez l’action, passez votre chemin. Mais si vous aimez les récits semblables aux rivières coulant doucement, le style de Mario Vargas Llosa à ses débuts, l’histoire péruvienne, l’art de la description qui transforme un roman en grand écran et cette folie douce des êtres rêveurs et singuliers, ce livre est pour vous.

"Je vous dédie mon silence" sonne un chant du cygne, parfois crépusculaire. Mais aussi baigné d’onirisme, comme espérer que la musique puisse rassembler.

 

Je vous dédie mon silence – Mario Vargas Llosa – Traduction : Albert Bensoussan & Daniel Lefort – Éditions Gallimard – Juin 2025

jeudi 21 août 2025

 

Noisette incontrôlable

Surchauffe

Nathan Devers

 


2023 après J.C. Toute la planète est sous le joug de la mondialisation. Pourtant un peuple résiste à l’envahisseur technologique : les Sentinelles dans l’archipel indien d’Andaman. Quiconque s’approche de leur île North Sentinel est quasi un condamné à mort comme l’a tristement expérimenté, en 2018, le jeune évangéliste John Chau. De toute façon il est dorénavant interdit de tenter une approche, pour des raisons sanitaires, cette tribu d’environ seulement 200 individus : les Sentinelles ne sont pas immunisés contre les maladies et ne survivraient pas au moindre virus. Malgré leurs 60.000 ans d’existence.

Le philosophe et romancier Nathan Devers a imaginé une fiction – proche de la science-fiction – autour de cette particularité ethnographique avec des personnages bien antipathiques, caractéristiques de ces ogres industriels aux dents de tyrannosaure.

Jade Elmire-Fasquin fait partie des têtes pensantes du premier groupe hôtelier mondial Arcadie. Proche du burn-out à cause de son rythme effréné de vie, de ses deux supérieurs voraces, Alexandre Jermiel et Jean-Christophe Moranges, et de son époux Thomas, journaliste chroniqueur vedette du petit écran, elle songe à prendre enfin une pause voire de démissionner. Mais Moranges lui propose une nouvelle mission : enquêter sur les possibilités d’une installation d’un grand complexe hôtelier aux îles Andaman, dans une île déserte – les tribus ayant été exterminées par les maladies importées – proche de celle des Sentinelles.  En fait un autre ogre est sur le projet, le multimilliardaire indien Rohan Baylan. Bien évidemment avec en poche les arguments habituels d’une construction respectueuse de l’environnement et des cultures vernaculaires.

Jade, malgré ses réticences et étant la seule ayant encore quelques souffles d’humanité, se lance à corps perdu dans ce projet, fascinée par l’histoire des Sentinelles et réfléchit à entrer en contact avec ce peuple. Mais, sans se douter des terribles conséquences qui suivront…

Un roman absolument captivant du début à la fin, magistralement écrit dans une langue aussi riche que savante. Même si certains clichés semblent poussés à l’extrême, l’histoire reste parfaitement crédible et traduit parfaitement l’univers cruel du monde des affaires, des rapports humains en entreprise, de la superficialité des « bonnes intentions », des discours hypnotiques…

Un subtil jeu de miroirs entre les Sentinelles et cette Surchauffe mondiale, entre l’ébullition des affaires et les relations professionnelles/privées se dessine au fil des pages pour alerter le lecteur. Comme pour son précédent roman « Les liens artificiels » Nathan Devers décrypte par la fiction la course effrénée des dérives humaines, ces ficelles agitées par des diables de tout poil pour accélérer la perte des âmes.

Au-delà du roman se pose la question sur l’avenir de ces peuples racines qui désormais ne représentent plus que 4% de la population mondiale. Pourtant, ils sont source d’inspiration face à la vésanie collective.

 Surchauffe – Nathan Devers – Éditions Albin Michel – Août 2025

mardi 29 juillet 2025

 

Noisette noire

La fille au pair

Sidonie Bonnic

 


Emmylou s’ennuie à Plouhernec. En fait s’ennuyer est un euphémisme, elle étouffe, elle explose, crie contre ses parents et sa petite sœur Maëlle. La situation s’envenime lorsque sa meilleure amie Morgane se suicide. Que faire pour s’en sortir, fuir ses origines modestes et étudier pour devenir journaliste, la géopolitique elle aime. Elle retrouve une amie de Morgane, Stéphanie, qui revient d’Angleterre après avoir été fille au pair. Emmylou commence à rêver. De la Bretagne à la Grande-Bretagne.

Le conte de fées commence merveilleusement. Un quartier privé ultra chic, une demeure où tout est luxe, un couple élégant et séduisant avec deux garçons adorables même si l’ainé est taciturne et semble souffrant. Et si tout n’était qu’un mirage ? Si cette famille aux apparences irréprochables cachait un secret effroyable… Bientôt la jeune fille va se retrouver dans une spirale infernale au royaume de la pure folie.

Un suspense psychologique haletant, parfaitement maîtrisé et qui maintient en haleine le lecteur jusqu’à la dernière phrase. Sidonie Bonnec mélange les codes littéraires du roman et du thriller pour un résultat éblouissant. Si certains clichés restent peut-être trop voyants cette histoire met en parallèle deux mondes mais sans en faire une satire sociale. Sans aucun doute, la primo-romancière s’est inspirée de La servante écarlate et de La femme de ménage tout en y apportant son expérience et son écriture très personnelle, à la fois moderne et respectant le ton d’une jeune fille de dix-huit ans.

La fille au pair – Sidonie Bonnic – Éditions Albin Michel – Février 2025

mardi 15 juillet 2025

 

Noisette mi-plume mi-pinceau

Une parcelle du monde

Catherine Vigourt

 


Une parcelle du monde. Quel joli titre pour convier le lecteur à entrer dans l’univers de Claude Monet à Giverny. Catherine Vigourt semble avoir tourné sa plume comme pour un guéridon pour entendre la voix du peintre raconter ses journées à peindre et à converser. Mais la romancière ne se contente pas de raconter, elle parle directement au peintre au cours de six journées situées entre 1893 et 1926.

À côté de l’œuvre de Claude Monet, nous découvrons son univers intime, ses proches, ses amis sous un jour nouveau, rempli de délicatesse et de sentiments voilés par l’approche pudique de la narratrice.

Une biographie, certes, mais bien au-delà de la « biographie romancée », une immersion dans ce coin de Normandie qui n’échappe pas à l’actualité, entre l’affaire Dreyfus, la première guerre mondiale et la connivence avec Le Tigre.

Mots et couleurs caracolent en douceur entre Alice, Blanche, la cuisinière Marguerite et son chenapan de Jules, Louis et son destin tragique, Matisse et Marquet, la marmelade d’orange et les peupliers. Même pour les derniers instants du Maître, un souffle de poésie bucolique inonde les paragraphes.

Une lecture apaisante pour cet hommage teinté d’un appel à la lenteur et à la contemplation.

Une parcelle du monde – Catherine Vigourt – Éditions Gallimard – Mai 2025

mardi 17 juin 2025

 

Noisette apaisante

À l’écoute du silence

Stéphanie Bodet

 


« Cultiver des liens d’amitié avec le cosmos, c’est se vouer à la vie éternelle »

 

En 2021, la championne d’escalade et autrice convoque dans une cabane sur les flancs des hauteurs ariègeoises un nouveau compagnon : le silence. Elle quitte pour quelques semaines ses Hautes-Alpes, son jardin, ses animaux et son compagnon humain qui n’aura aucune jalousie pour cet amant éphémère.

Stéphanie Bodet a besoin de se ressourcer, de vivre une expérience face à la nature, dans un confort limité au minimum pour retrouver de la force et faire corps avec l’immensité. Dotée d’une sensibilité à fleur de peau, elle fuit les bruits du monde, les conversations stériles, les rassemblements étouffants, la course à l’égo, l’esprit de compétition, la surconsommation… Le courage est l’une de ses valeurs, elle vous donnerait le vertige rien qu’en lisant sa prose sur ses envolées sur les sommets, dormant sur une roche avec plus de 3000 mètres de vide sous elle.

Avec une plume plongée dans un encrier de délicatesse, la quadragénaire nous fait partager son expérience du grand vide au sens figuré après l’avoir tant côtoyé au sens propre. Elle écoute le silence, communique avec lui. Le seul son qui charme son oreille est celui du chant de la terre et peu importe si les rongeurs de la cabane lui font vivre quelques péripéties. Ponctuées de réflexions qui feront écho à tout bipède excédé par le consumérisme, les errements de l’humanité ou encore par les démonstrations ostentatoires d’êtres épris de vitesse. Pour Stéphanie le temps suspendu n’est pas qu’en haute montagne, il est dans un regard porté sur une fleur éclose, dans l’écho d’un bruissement de feuilles, dans le cheminement d’un ruisseau, dans l’onirisme des nuages…

Un témoignage qui confirme que l’écoute, sans fioritures et sans hâte, de la vie est le véritable sens de l’existence.

À l’écoute du silence – Stéphanie Bodet – Éditions des Équateurs – Avril 2025

mardi 22 avril 2025

 

Noisette fleurie

Le jardin dans le ciel

Romain Potocki

 


« C’est le bouquin qui a tout démarré »

Tistou, les pouces verts. Maurice Druon – 1957. Académie française des années 50 versus cité des années 2020, carrément le grand écart ! Et pourtant…

Robert cause pas beaucoup, les mots et lui ça fait deux pour cause da handicap. Mais quand il tombe sur ce livre, il n’a plus qu’une idée en tête : semer des fleurs sur les toits des immeubles, faire jaillir la nature sur les blocs de béton. Ça changera de ses activités peu légales pour soigner sa mère malade. Et qui sait, ça en imposera aux différents clans du quartier. Robert devient Tistou, dealers de graines de poésie et de rêves en couleur. Il ne sera pas seul. Sophie la libraire va l’aider, Moustachu le jardiner aussi. Cette Sophie n’est pas commune, elle aussi on aimerait bien la rencontrer, elle conseille bien Tistou, son deuxième livre sera le Petit Prince, pas mal non ? Pour le reste je vous laisse découvrir par vous-même. Une fois que Sophie arrive, le roman prend le large pour un immense souffle de tendresse et de vagues oniriques.

Romain Potocki a mis toute sa passion dans l’écriture de ce livre, même qu’il ne l’a pas écrit, il l’a vécu, jusqu’à imprégner son ADN dessus. Unique. Pour l’histoire, les métaphores, le langage (ça surprend au départ mais on l’adopte vite car façon Molière c’était la cata assurée), l’esprit de partage et l’espoir. Immense espoir possible lorsqu’une étincelle fait jaillir tous les talents cachés de ces êtres que l’on ignore ou que l’on rejette car ils ne rentrent pas dans les cadres. J’admirais Romain Potocki en tant que journaliste et sa capacité à nous entraîner sur les routes du monde en mettant en lumière toute l’humanité qui subsiste et qu’il faut entretenir. Face à la dureté des destins.

Du fantasque dans toute sa singularité et ça fonctionne ! Une communauté avec l’amitié comme code au milieu d’une cité sans joie, qui semble sans âme dans ce gris perpétuel. Mais quand on veut et que le destin vous tend une branche pour s’élever, ça peut devenir un beau livre, un très grand livre. Merci Romain pour ce bel arbre planté dans l’univers littéraire qui a grand besoin d’un marchand de rêves et propulseur de positivité.

Putain de bouquin !

Le jardin dans le ciel – Romain Potocki – Éditions Albin Michel – Février 2025

 

 

 

 

mercredi 19 février 2025

 

Noisette enquêtrice

Les fantômes de Versailles

Jacques Forgeas

 


Vous aimez les romans historiques ? Nous sommes en 1673 sous le règne de Louis XIV avec Colbert et sa suite.

Vous aimez les polars ? La Reynie, le lieutenant général de police, est confronté à un difficile jeu de piste pour mettre la main sur un assassin et son complice qui éliminent des jeunes femmes et les abandonnent après avoir cousu leurs lèvres d’un fil de soie, certains qu’elles ne parleront plus.

Vous aimez la peinture ? Parfait, vous entrerez dans las coulisses de l’atelier de Pierre Mignard qui doit remettre un portrait de la duchesse de La Vallière et engage pour l’occasion un jeune assistant italien : Emilio. Sauf que le pauvre Emilio va devoir jouer sur deux tableaux : il va jouer les espions chez Mignard pour que La Reynie réponde aux craintes de Louis XIV sur la maîtresse en disgrâce, et, aider la police par ses esquisses réalisées à la morgue qui peuvent favoriser le dénouement de l’enquête. En prime, le jeune peintre a pour amante la comtesse de Gruissan qui, un jour, reçoit la visite de la Marquise de Montespan…

D’autres personnages aussi éclectiques que possible – Torsac et Delaruche, les inspecteurs du Grand Châtelet ; Marianne, la compagne d’Emilio, le Rat, un adolescent des rues mais futé comme un renard avec une bande à son image, un marin de la Royale, etc, viennent agrandir la galerie pour le plus grand plaisir du lecteur qui tiendra ce livre comme une pièce à conviction pour sa passion pour la littérature.

Pas un temps mort – sans jeu de mots -, de l’audace, toujours de l’audace avec élégance et fantaisie pour mettre la peinture au service de l’enquête. On arpente aussi bien les demeures prestigieuses que les bas- fonds de Paris avec une petite excursion à Marseille pour pimenter le tout. Il est rare de relire des polars puisque découvrir le ou les coupables est fondamental mais ces Fantômes de Versailles seront dans une pile à relire tant on ne peut tout savourer en une seule fois. Un régal !

Les fantômes de Versailles – Jacques Forgeas – Éditions Albin Michel – Janvier 2025

samedi 15 février 2025

 

Noisette en alerte

Tssitssi

Claire Castillon

 


Toujours une aventure un roman de Claire Castillon, on ne sait à quoi s’attendre mais une chose est certaine, la romancière frappe sans concession !

Hélène a 16 ans. Impertinente au plus haut degré, elle rêve de luxe, se focalise sur des sacs à main haut de gamme. Elle voudrait se faire de l’argent rapidement, Instagram peut lui ouvrir des portes, elle a quand même 1000 followers et ce n’est qu’un début. Mais sans ce prénom idiot, la belle Hélène, non merci. Tssitssi lui sied très bien : énigmatique, résonnant, soufflant la jeunesse. C’est parfait, ça va attirer les messieurs d’un âge certain. Oui, parce qu’Hélène veut attirer les vieux, être une chougar daddy pour pouvoir s’offrir des rêves.

Son univers est tout aussi sibyllin. Un père qui l’adore, une mère absente mais sa voix revient dans les pensées d’Hélène. Semblent présents une « nouvelle mère » et ses deux jumeaux. Et une autre conquête du père. Hélène s’énerve beaucoup, on la déteste. Tout au moins au début. Au fur et à mesure, on devine que quelque chose cloche : des blessures cachées jaillissent en transparence… comme des étincelles…

Tssitssi est tout simplement un grand roman. Percutant, incisif. Claire Castillon appuie là où ça fait mal, très mal, notamment l’exploitation sexuelle des mineurs dans un monde phallocrate et libidineux. De courts chapitres qui se lisent sans relâche, d’un trait : ce livre on ne peut le lâcher, comme un thriller avec pour plume une hache d’une efficacité redoutable. Quant à Hélène, peut-être que Tssitssi pourrait nous dire de ne jamais juger sur les apparences et que les fantômes sont omniprésents.

TssiTssi – Claire Castillon – Éditions Gallimard – Février 2025


  Noisette déterminée Et refleurir Kiyémis   L’histoire débute en 1954 dans la campagne camerounaise pour se terminer de nos jours e...